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Droit du travail

Mésentente salariés, non convocation visite reprise, dépression

Mon employeur n'intervient pas suite plusieurs demandes, orales et écrites de ma part quant à la mésentente, refus de travailler en équipe et mauvaise organisation avec ses 4 secrétaires et rumeurs à mon sujet. puis. il qualifie mes demandes d'imatures, m'infantilisant et disant que sa fille de moins de 5 ans aurait une meilleure approche..Je suis en arrêt de travail pour épisode dépressif, ce n'est pas le premier depuis que je suis chez eux, et courant de l'année j'ai été arrêté pour épisode dépressif majeur de plus de 21 jours, il n'a pas (alors que l'on me l'a annoncé à mon retour) organisé de viste de reprise. En outre, il a repris mon ancienneté cette année ce qui fait plus de 5 ans, est-ce que cela est pris en compte pour le maintien de salaire, car déjà près de 2 mois cette année, ais-je droit aux mêmes conditions que quelqu'un qui est déjà là depuis 5 ans ? (CCN du personnel des cabinets avocats)puis-je prendre acte de la rupture de mon contrat ?


Question posée le 22/10/2010

Par Sandyves

Date de la réponse : le 22/10/2010


Bonjour,

Aux termes de l'Accord National Interprofessionnel sur la définition du stress au travail en date du 2 juillet 2008, ' un état de stress survient lorsqu'il y a déséquilibre entre la perception qu'une personne a des contraintes que lui impose son environnement et la perception qu'elle a de ses propres ressources pour y faire face.


L'individu est capable de gérer la pression à court terme mais il éprouve de grandes difficultés face à une exposition prolongée ou répétée à des pressions intenses.

(') Le stress n'est pas une maladie mais une exposition prolongée au stress peut réduire l'efficacité de son travail et causer des problèmes de santé '.


Dans votre cas, il ne fait aucun doute que les problèmes de santé et de dépression dont vous êtes victime depuis plusieurs mois, sont directement issus de vos conditions de travail, imposées par votre employeur...

Les arrêts de principe rendus par la Chambre sociale de la Cour de Cassation (Cass soc 17 février 2010, n' 08-44298) vous permettent de solliciter éventuellement la condamnation de votre employeur à verser des dommages et intérêts, en réparation du préjudice causé directement par les conditions de travail et de management de la Société et ce, sur le fondement de l'obligation de sécurité de l'employeur (Article L4121-1du Code du Travail).


Dans le cas d'espèce précité, les troubles dépressifs nécessitant une prise en charge psychothérapeutique, étaient directement liés aux conditions de travail.


Les Dirigeants, pourtant alertés à plusieurs reprises par des courriers de la salariée, n'avaient pris aucune mesure pour résoudre les difficultés en question et les juges ont considéré que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, devait en assurer l'effectivité.


De même, dans un autre cas d'espèce, alors que l'altération de la santé de la salariée résultait d'une dégradation des conditions de travail et des pressions imposées par la restructuration de l'entreprise, l'employeur, qui avait pourtant été alerté par plusieurs courriers de celle-ci, n'avait pris aucune mesure pour les résoudre, avait manqué à son obligation de résultat, manquement induisant réparation, qui en l'espèce avait été évaluée à 30.000 euros.

S'agissant de votre arrêt de travail, le Code du travail interdit de licencier un salarié, notamment en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude constatée par le Médecin du travail. (Art L1152-1 Code du travail).

De jurisprudence constante, tel que rappelé dans un arrêt récent de la Chambre sociale de la Cour de Cassation, en date du 20 mai 2009: ' après une absence d'au moins vingt et un jours pour cause de maladie ou d'accident non professionnel, le salarié doit faire l'objet d'un examen de reprise du travail par le médecin du travail, seul de nature à mettre fin à la suspension du contrat de travail. (') ' (Cass soc 20 mai 2009 n' 08-40825)

Les juges suprêmes devaient adopter à nouveau cette position dans un arrêt en date du 7 juillet 2009, en réaffirmant d'autre part que le seul fait pour un salarié, de communiquer tardivement le justificatif de son absence pour maladie, ne pouvait constituer une faute grave. (Cass soc 7/07/2009 n' 08-41720)

En outre, la Cour de Cassation, a récemment réaffirmé dans un arrêt en date du 28 octobre 2009, ' aux termes de l'article R 4624-21 du Code du travail, les salariés bénéficient d'un examen de reprise pratiqué par le médecin du travail, les modalités de cet examen doivent être prévues par l'employeur (et non le salarié) et celui-ci de met en faute s'il n'y procède pas. '
(Cass soc 28 octobre 2009, n' 08-43251)

La visite de pré-reprise doit toujours être suivie d'une visite de reprise, puis d'une nouvelle visite quinze jours après, afin de déterminer si l'état du salarié constaté lors de la première visite est ' consolidé ' et donc confirmé.

En outre, en droit français, quelle que soit l'étendue de l'inaptitude, l'employeur doit proposer au salarié un poste en tenant compte des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des taches existantes dans l'entreprise.

Faute de reclassement dans le délai d'un mois (parce qu'en dépit de réelles démarches, cela s'est avéré impossible), l'employeur doit licencier le salarié ou reprendre le versement de son salaire. (L 122-24-4 ancien du Code du travail).

Espérant avoir répondu au moins pour partie à vos interrogations,

Bien cordialement.

Date de la réponse : le 23/10/2010

Tout à fait d'accord avec la réponse. Juste un complément sur la prise d'acte dont vous voulez connaître les modalités. Effectivement si vous pouvez prouver ce harcèlement moral (la charge de la preuve vous incombant), vous pouvez prendre acte de la rupture selon les informations que je vous communique ci-après.

La prise d'acte constitue une ' réponse ' à ce que le salarié considère comme un manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles ' non-paiement du salaire, par exemple, modification imposée du contrat de travail, actes de harcèlement moral... : ne pouvant laisser perdurer une situation qui lui fait grief, il va prendre l'initiative de rompre son contrat de travail mais il imputera la responsabilité de cette rupture à l'employeur.

La prise d'acte peut s'exprimer comme telle ' ' je prends acte de la rupture de votre fait ' ou d'autres façons qui signifient la même chose ' ' je considère mon contrat comme rompu de votre fait ', ' je me considère comme licencié ' : quelle que soit la formulation choisie, le salarié manifeste clairement qu'il n'entend pas assumer la responsabilité de la rupture et que son initiative de rupture n'est surtout pas une démission.

Le plus souvent, lorsqu'elle est assumée comme telle, la prise d'acte s'accompagne d'une cessation immédiate du travail.

Mais il arrive que le salarié, pas toujours au fait des subtilités de langage qui permettent de dissocier initiative et imputabilité de la rupture, donne sa démission.
Aussi la Cour de cassation assimile-t-elle à une prise d'acte la démission motivée, c'est-à-dire la démission assortie de griefs à l'encontre de l'employeur (Cass. soc., 15 mars 2006, no 03-45.031, Bull. civ. V, no 109 ; Cass. soc., 30 oct. 2007, no 06-43.327, Bull. civ. V, no 177 ; voir no 1999 ).

De même, en présence d'une démission émise sans réserve mais remise en cause ultérieurement par le salarié en raison de manquements qu'il impute à son employeur, le juge doit analyser cette démission en une prise d'acte si des circonstances antérieures ou contemporaines à la rupture la rendent équivoque (Cass. soc., 9 mai 2007, no 05-41.324, no 05-40.315, Bull. civ. V, no 71 ; voir no 2000 ).

La prise d'acte n'est pas incompatible avec une action en exécution du contrat de travail. La Cour de cassation considère en effet qu'un salarié qui agit en justice contre son employeur en exécution d'une obligation née du contrat peut toujours prendre acte de la rupture, que ce soit en raison des faits dont il a saisi le conseil de prud'hommes ou d'autres faits (Cass. soc., 21 déc. 2006, no 04-43.886, Bull. civ. V, no 413 ; Cass. soc., 21 nov. 2007, no 06-41.757 ; Cass. soc., 26 nov. 2008, no 07-40.254).


Démission et prise d'acte

Une salariée démissionnaire ne peut simultanément invoquer un vice du consentement et demander que sa démission soit analysée comme une prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur (Cass. soc., 17 mars 2010, no 09-40.465, no 499 FS-P+B).




Effets de la prise d'acte par le salarié : rupture immédiate du contrat:

Lorsqu'un salarié ' prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ' (Cass. soc., 25 juin 2003, no 01-42.335 ; Cass. soc., 25 juin 2003, no 01-42.578 ; Cass. soc., 25 juin 2003, no 01-43.679, Bull. civ. V, no 209 ; Cass. soc., 17 févr. 2004, no 01-42.427 ; Cass. soc., 12 oct. 2004, no 02-44.883, Bull. civ. V, no 249).

En d'autres termes, la prise d'acte de la rupture à l'initiative du salarié ne constitue ni un licenciement, ni une démission mais une rupture produisant les effets de l'un ou de l'autre selon que les griefs invoqués par le salarié étaient ou non justifiés.

Le mécanisme est exactement le même pour les ' démissions motivées ', c'est-à-dire les démissions assorties de griefs à l'encontre de l'employeur ( no 1999 ; Cass. soc., 19 oct. 2004, no 02-45.742, Bull. civ. V, no 263 ; Cass. soc., 15 mars 2006, no 03-45.031, Bull. civ. V, no 109 ; Cass. soc., 13 déc. 2006, no 04-40.527, Bull. civ. V, no 375 ; Cass. soc., 30 oct. 2007, no 06-43.327, Bull. civ. V, no 177).

Remarques

Par ces arrêts, la Cour de cassation est revenue sur une dérive jurisprudentielle qui requalifiait la prise d'acte de la rupture à l'initiative du salarié en licenciement sans cause réelle et sérieuse, même si en définitive les griefs invoqués n'étaient pas fondés (Cass. soc., 26 sept. 2002, no 00-41.823, Bull. civ. V, no 284 ; Cass. soc., 21 janv. 2003, no 00-44.502). Cette jurisprudence avait été abondamment critiquée comme consacrant un système ' d'autolicenciement ' selon l'expression du Professeur Jean-Emmanuel Ray.

La formulation choisie par la Cour de cassation (' cette rupture produit les effets' ') est importante.

Elle signifie qu'avec la prise d'acte, la rupture est consommée et définitive : ' La prise d'acte de la rupture entraîne cessation immédiate du contrat ' (Cass. soc., 30 janv. 2008, no 06-14.218, Bull. civ. V, no 28 ; Cass. soc., 9 déc. 2009, no 07-45.521, no 2501 FS-P+B+R). A cet égard, elle se révèle beaucoup plus risquée que l'action en résiliation judiciaire qui laisse subsister le contrat de travail jusqu'à ce que le juge se prononce.

Le juge saisi du litige doit se borner à rechercher si les griefs invoqués à l'appui de la prise d'acte par le salarié étaient ou non justifiés, sans prendre en considération des évènements postérieurs tels qu'une prise d'acte par l'employeur ou un licenciement.

En effet, ' le contrat étant rompu par la prise d'acte, peu importe la lettre envoyée postérieurement par l'employeur pour imputer au salarié la rupture ' (Cass. soc., 19 janv. 2005, no 02-41.113, Bull. civ. V, no 11), peu importe également le licenciement ultérieur, celui-ci devant être considéré comme ' non avenu ' (Cass. soc., 19 janv. 2005, no 03-45.018, Bull. civ. V, no 12 ; Cass. soc., 13 déc. 2006, no 05-44.206). Le fait que la prise d'acte soit intervenue alors qu'une procédure de licenciement est déjà engagée, c'est-à-dire alors que l'employeur a manifesté son intention de rompre, n'entame pas son caractère radical. La rupture est bel et bien consommée ' peu important la convocation du salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement ' (Cass. soc., 28 juin 2006, no 04-43.431, Bull. civ. V, no 232).

Autrement dit, la prise d'acte ' fige ' la situation, elle ' cristallise ' la rupture. Sauf arrangement entre les parties, une fois qu'elle est notifiée, il sera pratiquement impossible tant pour le salarié de faire marche arrière que pour l'employeur de régulariser la situation a posteriori en engageant une procédure de licenciement .

C'est bien le sens qu'il convient de donner à un arrêt du 14 octobre 2009 (Cass. soc., 14 oct. 2009, no 08-42.828 FS-P+B+R) où l'on a vu la Cour de cassation refuser toute valeur à la rétractation du salarié. La prise d'acte de rupture avait entraîné la rupture immédiate du contrat de travail et il était impossible de revenir en arrière.
Ainsi, le juge doit analyser les efforts de la rupture du contrat à la date où s'est manifesté le salarié (Cass. soc., 9 déc. 2009, no 07-45.521, no 2501, FS-P+B+R).



Griefs justifiant la prise d'acte:

La prise d'acte produira les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les griefs invoqués par le salarié sont justifiés, soit d'une démission dans le cas contraire. Cette notion de justification de la prise d'acte est donc essentielle.

a) Des manquements d'une gravité suffisante

Pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les faits invoqués par le salarié doivent non seulement être établis, mais constituer des manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur (voir J.-Y. Frouin, Semaine sociale Lamy, no 1119 ; Cass. soc., 19 janv. 2005, no 03-45.018, Bull. civ. V, no 12).

Il en sera ainsi de comportements délibérés rendant impossible la poursuite des relations contractuelles tels que :
la modification unilatérale du contrat de travail (Cass. soc., 13 juill. 2005, no 03-45.247 ; Cass. soc., 9 avr. 2008, no 07-40.668 : modification des conditions de rémunération) ;
le non-paiement du salaire (Cass. soc., 6 juill. 2004, no 02-42.642) ;
le fait de ne pas rémunérer l'intégralité des heures de travail effectuées par le salarié, de ne rémunérer que partiellement les heures supplémentaires et de ne pas régler intégralement les indemnités de repas (Cass. soc., 20 janv. 2010, no 08-43.476) ;
les mesures vexatoires, les agissements constitutifs de violences morales et psychologiques (Cass. soc., 26 janv. 2005, no 02-47.296, Bull. civ. V, no 23), d'atteinte à l'intégrité physique (Cass. soc., 30 oct. 2007, no 06-43.327, Bull. civ. V, no 177) ; ce qui vous concerne particulièrement !!!

le fait de ne pas prendre les mesures permettant de protéger une salariée contre les agissements d'harcèlement moral et sexuel d'un supérieur hiérarchique et, ce même si l'employeur a réagi aussitôt qu'il a eu connaissance de la ' détresse ' de la salariée. Il a en effet failli à son obligation de sécurité de résultat (Cass. soc., 3 févr. 2010, no 08-44.019 ; voir aussi, pour une solution analogue, Cass. soc., 3 févr. 2010, no 08-40.144 P+B).

le non-respect du repos hebdomadaire (Cass. soc., 7 oct. 2005, no 01-44.635), des repos compensateurs (Cass. soc., 9 mai 2007, no 05-40.315, Bull. civ. V, no 70) ;
le manquement à l'obligation de sécurité (Cass. soc., 29 juin 2005, no 03-44.412, Bull. civ. V, no 219, espèce où le laxisme de l'employeur en matière de lutte contre le tabagisme a légitimé une prise d'acte de la rupture) ;

l'exclusion de la part variable de la rémunération, de l'assiette de calcul de l'indemnisation conventionnelle due en cas de maladie (dans cette affaire, la convention collective n'excluait du maintien de salaire que les primes et les gratifications ' Cass. soc., 19 mai 2009, no 07-45.692, no 1076 F-P+B) ;

le fait de ne pas réintégrer une salariée, de retour d'un congé de maternité, dans ses anciennes fonctions ou dans des fonctions équivalentes. En l'espèce, une enseignante cumule ses fonctions pédagogiques avec des tâches d'encadrement. A son retour, elle est réaffectée dans la classe où la directrice de l'école est le professeur principal. Il s'ensuit inévitablement la perte d'une partie de ses fonctions d'encadrement, ce qui, d'une part, constitue une modification du contrat de travail et, d'autre part, est une circonstance suffisante pour que la prise d'acte de rupture produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 3 févr. 2010, no 08-40.338).
En revanche, un manquement ponctuel de l'employeur à ses obligations contractuelles, explicable par des circonstances indépendantes de sa volonté, sans que soit en cause sa bonne foi, ne saurait légitimer une prise d'acte de la rupture à ses torts.
Ainsi, le non-règlement du salaire par une association en difficulté n'a pas été jugé suffisant pour justifier une prise d'acte intervenue, il est vrai, au moment où la situation allait être débloquée (Cass. soc., 4 nov. 2003, no 01-44.740), un décalage d'un jour ou deux dans le paiement du salaire, explicable par l'incidence de jours fériés, ne saurait davantage suffire à justifier une prise d'acte (Cass. soc., 19 janv. 2005, no 03-45.018, Bull. civ. V, no 12).

Dans le même esprit, il faut considérer qu'une erreur matérielle dans le calcul du salaire ou le non-versement ponctuel d'une prime ne peuvent légitimer une prise d'acte par le salarié.

D'une manière générale, il ne suffit pas qu'un salarié soit fondé dans ses revendications à l'appui de sa prise d'acte pour que celle-ci soit nécessairement justifiée. Dans leur appréciation, les juges peuvent prendre en considération son caractère prématuré au regard notamment de l'attitude conciliante de l'employeur (Cass. soc., 2 juill. 2008, no 07-41.372).

b) Portée des griefs énoncés dans la lettre de prise d'acte:

Pour apprécier si la prise d'acte est ou non justifiée, les juges ne sont pas liés par les griefs énoncés dans la lettre qui la notifie.

En effet, ' l'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à l'employeur ne fixe pas les limites du litige ' ; dès lors ' le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit ' (Cass. soc., 29 juin 2005, no 03-42.804, Bull. civ. V, no 223 ; Cass. soc., 15 févr. 2006, no 03-47.363 ; Cass. soc., 9 avr. 2008, no 07-40.668).

En d'autres termes, le salarié ne saurait être ' enfermé ' dans les griefs qu'il invoque dans sa lettre de prise d'acte. S'il en existe d'autres, à condition que le salarié soit en mesure de les établir et qu'ils soient antérieurs à la date où il a pris acte, il peut les faire valoir devant le juge.

Remarques

Avec cet arrêt, la Cour de cassation a levé une ambiguïté contenue dans un précédent où elle énonçait que ' seuls les faits invoqués par le salarié à l'appui de sa prise d'acte permettent de requalifier la démission en licenciement ' (Cass. soc., 19 oct. 2004, no 02-45.742). Une telle formulation laissait entendre que la lettre de prise d'acte, à l'instar de la lettre de licenciement, fixait les limites du litige et interdisait au salarié, dans le cadre d'une action en justice, d'en ajouter ou d'en substituer d'autres pour justifier son initiative. La présente solution se justifie dans la mesure où, contrairement au droit du licenciement, il n'existe pas de formalisme imposé à la prise d'acte, pas plus d'ailleurs qu'à la démission. Dès lors que l'une et l'autre peuvent être formulées verbalement, le choix du salarié en faveur d'un écrit ne saurait jouer à son détriment.

c) Charge de la preuve

C'est au salarié, et à lui seul, qu'il incombe d'établir les faits allégués à l'encontre de l'employeur. S'il n'est pas en mesure de le faire, s'il subsiste un doute sur la réalité des faits invoqués à l'appui de sa prise d'acte, celle-ci doit produire les effets d'une démission (Cass. soc., 19 déc. 2007, no 06-44.754, Bull. civ. V, no 219 ; Cass. soc., 9 avr. 2008, no 06-44.191).

Toutefois, la Cour de cassation admet implicitement que le fait pour un employeur de ne pas avoir procédé à l'adaptation de poste préconisée par le médecin du travail concernant un salarié déclaré partiellement inapte à son emploi, peut justifier une prise d'acte, par celui-ci, de la rupture de son contrat aux torts de l'entreprise.
La Cour précise, à cette occasion, que c'est à l'employeur de justifier des mesures prises pour adapter le poste de travail du salarié ou des raisons qui les rendaient impossibles. Ce n'est pas au salarié de prouver que son employeur n'a pas respecté ses obligations en la matière (Cass. soc., 14 oct. 2009, no 08-42.828 FS-P+B+R).

On observera que contrairement au droit du licenciement, le doute profite en quelque sorte à l'employeur, ce qui fait bien de la prise d'acte une initiative risquée. Mais je vous souhaite une bonne chance dans votre action.


Cordialement,
JP DA ROS
Réseau juridique de proximité CFTC

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