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Conges sabbatiques

Publié par Jean-pierre DA ROS le 24/07/2010 | Lu 6219 fois | 0 réaction

La loi du 3 janvier 1984 a consacré le droit pour les salariés de suspendre leur contrat de travail en bénéficiant d'une garantie de réemploi dans leur emploi antérieur pour satisfaire des aspirations personnelles (L. no 84-4, 3 janv. 1984, JO 4 janv.).

CONGES SABBATIQUES

Conditions

La loi du 3 janvier 1984 a consacré le droit pour les salariés de suspendre leur contrat de travail en bénéficiant d'une garantie de réemploi dans leur emploi antérieur pour satisfaire des aspirations personnelles (L. no 84-4, 3 janv. 1984, JO 4 janv.).

Le droit au congé sabbatique est subordonné à une durée d'activité professionnelle de 6 ans et à une ancienneté dans l'entreprise – ou le groupe – de 36 mois consécutifs ou non. L'intéressé ne doit pas, par ailleurs, avoir bénéficié dans l'entreprise au cours des 6 années précédentes d'un congé sabbatique, d'un congé pour la création d'entreprise ou d'un congé de formation d'au moins 6 mois (C. trav., art. L. 3142-91 et s.). Un congé sabbatique ne peut donc s'inscrire dans le prolongement d'un congé pour création d'entreprise.

Le congé a une durée minimale de 6 mois et une durée maximale de 11 mois pendant laquelle le contrat de travail est suspendu.

Procédure

Il appartient au salarié d'informer l'employeur de son intention au moins 3 mois à l'avance par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge, en précisant la date de départ et la durée du congé. A défaut de réponse de l'employeur dans un délai de 30 jours, son accord est réputé acquis (C. trav., art. L. 3142-98).

De son côté, l'employeur doit communiquer semestriellement au comité d'entreprise et, à défaut, aux délégués du personnel la liste des demandes de congés sabbatiques avec l'indication de la suite donnée (C. trav., art. L. 3142-106).

L'employeur a la faculté de différer le congé, dans la limite de 9 mois pour les entreprises de moins de 200 salariés, de 6 mois pour les autres entreprises. Il doit en informer le salarié par lettre remise en main propre contre décharge ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (C. trav., art. D. 3142-53).

L'effectif est apprécié au niveau de l'entreprise. Lorsqu'un même salarié est employé par deux sociétés, l'effectif est toujours déterminé au niveau de chaque entreprise dès lors que les deux entreprises n'ont pas les mêmes dirigeants, qu'elles exercent des activités distinctes et, qu'elles exercent chacune un pouvoir disciplinaire à l'égard des salariés. L'existence d'instances représentatives communes n'a aucune incidence (Cass. soc., 17 avr. 1996, no 93-41.168, Bull. civ. V, p. 122).

S'agissant d'une entreprise de plus de 200 salariés, il a été jugé que lorsque l'information de la date et de la durée de son départ est faite par le salarié hors du délai de trois mois prévu par l'article D. 3142-47 du Code du travail, cette irrégularité si elle peut conduire l'employeur à différer la date de départ du salarié, ne saurait le dispenser de lui répondre dans les conditions prévues à l'article D. 3142-53.

En effet, la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur n'avait pas répondu au salarié dans le délai d'un mois, d'où il suit que son accord tacite sur la date de départ du salarié était acquis, a décidé, à bon droit, que le licenciement du salarié pour faute grave en raison d'une « absence illégale et délibérée » n'était pas justifié (Cass. soc., 12 mars 2008, no 06-43.866 P+B+R).

L'article L. 3142-96 fixe également un pourcentage d'absences simultanées englobant les congés pour création d'entreprise et les congés sabbatiques au-delà duquel l'employeur peut différer le départ en congé jusqu'à la date où les absences s'établissent au-dessous de ce taux. Ce taux est fixé à 1,5 %. Dans les entreprises de moins de 200 salariés, le pourcentage se détermine en nombre de jours de travail effectué dans les 12 mois précédant le départ en congé (ce délai de 12 mois est prolongé dans la limite de 48 mois, lorsqu'il s'agit de permettre le départ en congé d'un seul salarié). Dans les entreprises de moins de 200 salariés, l'employeur peut au surplus s'opposer au départ d'un salarié en congé, après avis du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, s'il estime que cette absence peut avoir des conséquences préjudiciables à la marche de l'entreprise ou à la production.

L'effectif de l'entreprise est calculé selon les dispositions de l'article L. 1111-2 du Code du travail.

L'employeur doit motiver son refus et le notifier au salarié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge (C. trav., art. D. 3142-53). Le salarié peut, dans un délai de 15 jours, contester le bien-fondé du refus devant le bureau de jugement du conseil de prud'hommes statuant en référé (C. trav., art. L. 3142-97). Le refus de l'employeur peut ainsi être annulé par les juges lorsqu'ils constatent que l'absence du salarié n'aurait pas d'effet préjudiciable pour l'entreprise et qu'ils considèrent cette décision injustifiée. Et dans cette hypothèse, l'employeur ne peut plus ensuite demander le report de ce congé (Cass. soc., 2 févr. 1999, no 96-41.812, Bull. civ. V, no 54).

La loi laisse au salarié la faculté de reporter jusqu'à son départ en congé pour création d'entreprise ou en congé sabbatique les congés payés annuels lui restant dus au-delà de 24 jours ouvrables – essentiellement la cinquième semaine. Ce report des congés payés ne peut porter sur plus de 6 années (C. trav., art. L. 3142-100). Le report de congé est cumulable avec celui prévu dans le cadre du compte épargne-temps  (voir no 2971 et s.) .

Lorsqu'un employeur accorde un congé sabbatique à un salarié, il conserve, sauf abus de sa part, le droit de s'opposer à la renonciation de son congé par le salarié. En l'espèce, l'employeur avait motivé son refus de prendre en considération cette renonciation par l'embauche d'une remplaçante (Cass. soc., 7 mai 1996, no 92-43.545, Bull. civ. V, p. 128).

Effets

Le salarié perçoit à son départ l'indemnité afférente aux jours de congés payés ainsi reportés. Il s'agit donc d'une capitalisation d'une partie des congés payés, sous la forme d'une indemnité compensatrice. Si le salarié est conduit à renoncer au congé pour création d'entreprise ou au congé sabbatique, les jours de congés payés qu'il avait reportés en vue de ce congé s'ajoutent par fraction de 6 jours, jusqu'à épuisement, aux congés payés des années suivant la renonciation ; pendant cette période aucun nouveau report de congés payés n'est possible. En cas de rupture du contrat de travail, les congés payés reportés se traduisent par le versement d'une indemnité compensatrice.

Le salarié peut exercer une activité salariée ou non pendant son congé, dès lors qu'il respecte les obligations de loyauté et de non-concurrence qui continuent à le lier (Cass. soc., 1er avr. 2003, no 00-44.902). La Cour de cassation retient comme significatif le fait que l'employeur a été informé dès l'origine de l'utilisation que le salarié entendait faire de son congé sabbatique sans avoir manifesté aucune opposition (Cass. soc., 27 nov. 1991, no 88-43.161).

A l'issue du congé, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire, assorti d'une rémunération au moins équivalente. Ainsi, lorsque le contrat de travail n'a pas subi de modification du fait du changement de lieu d'exercice de la profession, les juges retiennent que le salarié retrouve un emploi similaire à celui qu'il occupait avant son départ en congé sabbatique (Cass. soc., 25 juin 1997, no 95-40.425). Dans l'hypothèse où l'ancien emploi du salarié a disparu en raison de la transformation de la société, le refus de l'intéressé d'occuper un emploi similaire peut conduire à son licenciement (Cass. soc., 15 janv. 2003, no 00-45.968). En revanche, un employeur ne peut pas imposer au salarié un nouvel emploi impliquant un changement de résidence (Cass. soc., 26 févr. 1997, no 94-41.071). Le salarié ne peut invoquer le droit à réemploi par anticipation avant l'expiration de son congé (C. trav., art. L. 3142-95). Le seul fait pour l'employeur de ne pas réintégrer le salarié dans l'entreprise dans les conditions prescrites donne droit à l'attribution de dommages-intérêts compensant le préjudice entraîné par la perte de l'emploi, en sus de l'indemnité de licenciement (C. trav., art. L. 3142-105 ; Cass. soc., 16 mars 1989, no 86-42.328, Bull. civ. V, p. 135 ; Cass. soc., 2 mars 1993, no 89-43.209). Ce droit à dommages et intérêts est acquis dès lors que l'employeur n'a pas satisfait à son obligation, sans qu'il y ait à se placer sur le terrain de l'absence de cause réelle et sérieuse pour en justifier l'octroi (Cass. soc., 16 mars 1989, no 86-42.328, Bull. civ. V, p. 135). Il appartient au juge de fixer les dommages et intérêts en considération des circonstances. Et il a été jugé que l'employeur qui a manqué à son obligation légale de proposition de réintégration ne saurait, suite à la saisine du salarié du conseil de prud'hommes visant à contester ce manquement, le licencier pour abandon de poste, la lettre de licenciement adressée postérieurement à la saisine de la juridiction étant de nul effet (Cass. soc., 21 juin 2006, no 05-40.648).

Le salarié en congé sabbatique conserve le bénéfice des prestations en nature du régime général dans le cadre des dispositions de l'article L. 161-8 du Code de la sécurité sociale.

Les sommes versées à l'occasion d'un congé sabbatique sont soumises à cotisations selon les taux et plafonds en vigueur lors de leur attribution sans qu'il y ait lieu de les rattacher à la dernière période d'emploi rémunérée (Instr. générale ACOSS no 1/84, juin 1989).

Sommes versées en cas d'inactivité (infos diverses, mais dont les congés sabbatiques sont concernés)

a) Principe

Sont soumises à cotisations, aux taux de droit commun, les sommes versées pendant la suspension du contrat de travail, en application des articles L. 242-1 et R. 242-1 du Code de la sécurité sociale.

Tel est le cas, notamment :

des indemnités de congés payés ;

des sommes versées pendant le congé de naissance  (voir no 1691), pendant le congé formation , pendant un congé sabbatique ;

des allocations complémentaires aux indemnités journalières de sécurité sociale versées au titre des périodes d'incapacité temporaire de travail consécutive à une maladie, un accident ou une maternité, en application du contrat de travail ou d'une convention collective, lorsqu'elles sont destinées à maintenir en tout ou en partie le salaire d'activité, pendant ces périodes. Peu importe que ces allocations soient versées directement par l'employeur ou pour son compte par l'intermédiaire d'un tiers. L'assiette des cotisations est cependant différente selon que les allocations font l'objet d'un financement exclusif de l'employeur ou d'un financement conjoint employeur/salarié ;

des allocations de chômage partiel versées par l'employeur lorsque leur attribution n'est pas prévue par un accord professionnel ou interprofessionnel national ou régional (C. trav., art. L. 5122-4) ;

des rémunérations perçues par les salariés en congé de reclassement pendant la période n'excédant pas le préavis.

b) Exceptions

Sont cependant exclues de l'assiette des cotisations :

les indemnités journalières de sécurité sociale  (voir no 4949). Sur les incidences concernant le maintien du salaire net;

les indemnités versées en complément des pensions d'invalidité et des rentes d'accident du travail, jusqu'à l'âge de 60 ans, que le contrat soit rompu ou non (au-delà de cet âge, les avantages d'invalidité sont transformés en avantages vieillesse);

les rémunérations maintenues en tout ou partie pendant une période de rappel sous les drapeaux (CSS, art. L. 372-1), y compris les sommes se rapportant à une activité antérieure à la date d'incorporation pour autant que le versement n'ait été ni différé ni anticipé par rapport aux autres salariés de l'entreprise (Instr. ACOSS, juin 1989) ;

les indemnités de chômage partiel versées en vertu d'un accord professionnel ou interprofessionnel, national ou régional et les indemnités de chômage-intempéries légales et complémentaires versées aux travailleurs du bâtiment et des travaux publics à condition que l'employeur soit affilié à une caisse de congés payés;

les allocations spécifiques de conversion ;

les allocations servies aux salariés en congé de reclassement pendant la durée qui excède celle du préavis, jusqu'au terme du congé de reclassement. Elles restent cependant soumises à CSG et CRDS (Circ. DGEFP/DRT/DSS no 2002-01, 5 mai 2002);

les sommes versées aux salariés en exécution de décisions de justice à la suite de la fermeture jugée irrégulière de l'entreprise au cours d'un conflit collectif : le manquement fautif de l'employeur à son obligation de fournir du travail cause un préjudice à ses salariés, aucun salaire n'étant dû lors de la période de fermeture de l'entreprise (Cass. soc., 23 oct. 1997, no 95-19.444).

Jean-Pierre DA ROS


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