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Rupture conventionnelle, différence de traitement entre les salariés

Publié par Jean-pierre DA ROS le 22/09/2011 - Dans le thème :

Emploi et vie professionnelle

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La rupture conventionnelle comme son nom l'indique est une convention et non un licenciement. Il faut l'accord des deux parties (employeur et salarié). Il est donc à la base impossible légalement d'imposer à l'employeur l'utilisation de cette rupture. D'autant plus qu'il lui est imposé de donner au minimum l'indemnité légale voire conventionnelle si elle existe. Il préfère en général, quand la demande vient du salarié, le laisser démissionner, comme ça il n'a que les congés payés à lui donner. La rupture conventionnelle peut aussi être utilisée avec un salarié protégé, après autorisation de l'inspection du travail.
Un employeur peut-il l'accorder à un salarié et pas à un autre au sein de la même entreprise ?
C'est parfois le cas. Plusieurs raisons possibles. La principale étant la volonté de se séparer d'un salarié. Au moins l'employeur est sûr que le salarié, s'il est demandeur, partira à coup sûr. Il peut y avoir d'autres raisons par exemple, une ancienneté faible qui entraînera des indemnités minimes pourra être plus facilement acceptée par l'employeur que pour un salarié très ancien.
Maintenant est-ce légal d'en accepter certaines et pas d'autres ?
A mon avis, sauf cas de modification de l'état financier de l'entreprise (rupture conventionnelle pour motif économique), ou de justification par l'employeur de l'impossibilité de se séparer d'un collaborateur nécessaire à la bonne marche de l'entreprise, on ne peut pas justifier une différence de traitement au niveau de l'entreprise, surtout si les demandes sont proches dans le temps. Il y aurait effectivement une discrimination.
L'égalité entre les hommes est un droit fondamental de la personne proclamé aussi bien par la Déclaration des droits de l'Homme de 1789 (art. 1er et 6) que par la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne (art. 20).
Ce droit fondamental a donc naturellement sa place dans l'entreprise.
Il est consacré par l'article L. 1121-1 du Code du travail : « Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. »
Ce texte signifie que les droits de la personne et les libertés individuelles et collectives des citoyens sont applicables de plein droit dans les entreprises. Les droits et libertés peuvent seulement subir des restrictions à la double condition d'être justifiées objectivement et proportionnées à la situation concrète.
Ni la loi, ni le règlement, ni le contrat de travail, ni un accord collectif, ni une décision unilatérale de l'employeur ne peuvent réduire à néant cette règle d'égalité.
La jurisprudence ne s'est pas bornée à appliquer, souvent avec force, les dispositions légales comportant l'affirmation du principe d'égalité. Elle a donné à ce principe une portée qui apparaît de plus en plus générale, à telle enseigne qu'on a pu parler de l'émergence « d'un droit général à l'égalité de traitement dans les relations de travail » Elle l'a notamment étendu à d'autres éléments que le salaire et notamment au domaine du licenciement économique, aux apprentis et au droit syndical et à ce titre on ne peut écarter la différence dans le choix de salariés pour leur accorder la rupture conventionnelle.
Maintenant il faut pour le faire reconnaître aller aux prud'hommes.
La loi no 2001-1016 du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre les discriminations a procédé à l'unification du régime de la preuve pour tout litige relatif à une discrimination prohibée (C. trav., art.L.1144-1).En droite ligne de la directive européenne no 97/80 du 15 décembre 1997, le Code du travail a aménagé le régime de la preuve en matière de discrimination.
Ainsi, en cas de litige, il appartient d'abord au salarié qui s'estime victime « de présenter des éléments de faits laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ».L'employeur doit de son côté prouver que la situation ou que « sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ».
Le juge forme ensuite sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles (C. trav., art. L. 1134-1).
Ce régime de preuve est directement issu de la jurisprudence communautaire qui avait été, déjà, appliquée par la Cour de cassation (Cass. soc., 23 nov. 1999, no 97-42.940, Bull. civ. V, no 447 ; Cass. soc., 28 mars 2000, no 97-45.258, Bull. civ. V, no 126 ; Cass. soc., 10 nov. 2000, no 98-41.389, Bull. civ. V, no 317).
Le système ne consiste donc pas à mettre la charge de la preuve sur l'employeur, il répartit la charge de la preuve sur les deux parties en cause.
Au salarié qui estime avoir été lésé sur ce choix concernant la rupture conventionnelle, qui au moins en apparence, peut laisser croire à une discrimination, de saisir la justice pour le faire reconnaître en rassemblant les preuves d'une situation identique entre les salariés et un traitement différent ( restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché). Ce sera donc à l'employeur de démontrer que le traitement n'est pas discriminatoire, en rapportant la preuve qu'il a  accordé à l'un une rupture conventionnelle et pas à l'autre pour une raison dont il peut se justifier.


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