Incitation à la haine raciale : Le Pen irresponsable et le tribunal incompétent

Publié par Documentissime le 03/12/2010 | Lu 7978 fois | 1 réaction

Assigné devant le Tribunal correctionnel de Paris par les associations Licra et SOS Racisme, Jean-Marie Le Pen vient d'échapper à une nouvelle condamnation pour de pures questions de forme. Les faites remontent à mars 2010 : JM Le Pen avait diffusé des affiches de campagne des élections régionales de nature outrageantes pour la communauté musulmane et algérienne, selon les associations. Le 28 octobre dernier, le Procureur de la République avait requis à l'encontre du politicien une peine de 2 mois d'emprisonnement avec sursis, assortie d'un an d'inéligibilité. Hier, le Tribunal n'a pas suivi le ministère public et sans avoir à juger sur le fond, il a relaxé Jean-Marie Le Pen pour vice de forme.

Relaxe pour vice de forme

Le site Documentissime s’était penché fin octobre dernier sur les nouveaux déboires du leader du Front national français avec la justice.

En mars 2010, au cours des élections régionales, le Front national avait placardé sur la place publique une affiche de campagne électorale, ayant pour titre « non à l’islamisme ». Sur cette affiche, une femme intégralement voilée était représentée, ainsi qu’une carte de l’hexagone recouverte de minarets aux apparences de missiles, le tout sur un fond illustré par un drapeau de l’Algérie.

Ces affiches avaient été diffusées dans en premier temps dans la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, mais surtout sur le site internet du mouvement Jeunesse du Front national.

Or, si le juge des référés avait exigé le retrait des affichettes litigieuses sur la place publique, la tâche était plus délicate quant à faire disparaître la diffusion de la campagne reprochée sur la toile.

C’est donc en raison de la diffusion en ligne de ces affichettes que les associations Licra et SOS Racisme ont engagé la responsabilité pénale du politicien devant le Tribunal correctionnel de Paris.

« C’est un procès d’intention à M. Le Pen ! » avait alors déclaré l’avocat de Jean-Marie Le Pen dans le journal Le Monde.

Hier, c’est certainement avec un certain sourire que ce dernier a accueilli la décision des juges de première instance. La 17ième chambre du Tribunal correctionnel de Paris a en effet relaxé Jean-Marie Le Pen des faits d’incitation à la haine raciale.

Le tribunal a jugé que Jean-Marie Le Pen n'était "ni l'auteur de l'affiche en cause, ni le responsable des sites sur lesquels elle avait été diffusée", et qu’il n’avait donc pas lieu de le poursuivre.

Par ailleurs, concernant l'affichage sur les panneaux électoraux de la région PACA, il s'est déclaré incompétent territorialement.

Le Tribunal jugeant ainsi ne s’est pas prononcé sur le fond du dossier, à savoir l’existence ou non de fait d’incitation à la haine raciale.

Mais, le succès de la défense n’est qu’une demi-victoire ! Le Tribunal n’ayant pas eu à juger sur le fond, il ne se prononcera jamais sur la responsabilité ou non du politique pour  les sites internet ayant publiés les affiches.

Le parquet a dix jours pour faire appel. SOS Racisme attend de connaître la décision du parquet avant d'interjeter ou non appel.

Colère et dépit des parties civiles

« Sa responsabilité était évidente! », s'est insurgé Me Patrick Klugman, l'un des avocats de l’association SOS Racisme.

Quant à Patrick Gaubert, ancien président de la Licra, il dit ne pas comprendre la justice française : « J’ai du mal à comprendre la justice. Dans un premier temps, elle décide de retirer les affiches. Maintenant, elle le relaxe. On ne peut pas accepter ce genre d’affiche, sinon on accepte tout. Le Pen veut faire croire que les musulmans sont tous des fondamentalistes, ce qui n’est pas vrai. Il devait être condamné ».

Les règles procédurales en Droit pénal

Les nullités en procédure pénale sont régies par les articles 802 du Code de procédure pénale.

Le respect des formes est juridiquement nécessaire, autant en droit pénal qu’en droit civil.

La procédure pénale vise à protéger les intérêts d'une partie contre d'éventuelles manœuvres de l'autre partie ou de l'arbitraire du juge. Toutefois, un procès peut être perdu pour des pures raison de forme.