Un coup de jeune pour la cellule française anti-blanchiment Tracfin

Publié par Documentissime le 18/01/2011 | Lu 10768 fois | 2 réactions

La cellule française de lutte anti-blanchiment, dit Tracfin, fait peau neuve grâce à un décret et un arrêté en date du 7 janvier 2011, portant modification de son organisation. Le traitement de renseignement et action contre les circuits financiers et clandestins (Tracfin) va se moderniser et se concentrer autour de deux départements et d'une cellule spécialisée. La communication des notes d'information à l'autorité judiciaire se trouve également modifiée.

Le décret n° 2011-28 et son arrêté en date du 7 janvier 2011 modifient l'organisation de Tracfin, selon la volonté du ministère des Finances français.

Dorénavant, Tracfin s’organise autour de deux départements et d'une cellule spécialisée, à savoir :

  • un département de l'analyse, du renseignement et de l'information (DARI) en charge du recueil des déclarations de soupçons, de leur orientation, de l'analyse du renseignement financier et des relations avec les professionnels déclarants ainsi que des relations internationales, qui devient l’interlocuteur privilégié des professionnels soumis à déclaration.
  • un département des enquêtes (DE) assurant les investigations approfondies nécessaires au traitement des affaires les plus complexes.
  • une cellule spécifique dédiée au traitement des affaires de financement du terrorisme.

 

En outre, la DAAF, le département des affaires administratives et financières, se substitue à la cellule « affaires générales » et assure les fonctions supports.

Par ailleurs, un magistrat issu de la magistrature judiciaire, assumant un rôle de conseiller juridique de Tracfin, devra désormais obligatoirement rendre un avis consultatif sur tous les dossiers transmis à l'Autorité judiciaire par Tracfin, excepté cas d'urgence.

Tracfin : brigade nationale contre le blanchiment d’argent

Le traitement de renseignement et action contre les circuits financiers et clandestins, baptisé « Tracfin » est un service à compétence nationale, participant à la protection de l’économie nationale.

Tracfin a pour mission de lutter contre les circuits financiers clandestins, le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

Le service assure ainsi la préservation et le développement de circuits financiers sains ainsi qu’une meilleure régulation de l’économie.

Une liste exhaustive de professionnels, tels que les experts-comptables, les avocats, les notaires, les banques, les entreprises d'investissement, les représentants légaux et directeurs responsables des opérateurs de jeux, les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, ou encore les agents sportifs, sont contraints de signaler à Tracfin, des opérations financières atypiques suspectées de blanchiment. (Article L561-2 du Code monétaire et financier)

Ces déclarations sont analysées, font l'objet, le cas échéant, d'investigations complémentaires et peuvent conduire Tracfin à transmettre une note d’information au procureur de la République territorialement compétent ou à certains services spécialisés (Services de police judiciaire, administration financière, cellules de renseignement financier étrangères).

Pour mener à bien son action de lutte anti blanchiment, Tracfin dispose d’un droit de communication auprès des professionnels impliqués dans la lutte anti blanchiment et soumis au devoir de signalement à Tracfin, d’opérations financières douteuses.

Ainsi,Tracfin peut demander que lesdits professionnels lui communiquent les pièces utiles à son  enquête. Le service peut également fixer au professionnel un délai pour la transmission de ces éléments.

Tracfin dispose également d’undroit d’opposition à la réalisation d’une opération financière douteuse. Lorsque cette dernière a été signalée par un professionnel avant sa réalisation, Tracfin peut s’opposer à la réalisation de cette opération (Article L.561-25 du code monétaire et financier).

Les obligations de l’avocat dans la lutte contre le blanchiment d’argent

Les avocats, de par les contraintes de leur déontologie, bénéficient d’un régime dérogatoire face à Tracfin.

Par exemple, dans le cadre de son droit de communication, Tracfin ne peut l’exercer directement auprès des avocats. La cellule anti blanchiment doit envoyer sa demande au bâtonnier de l’ordre auprès duquel l’avocat est inscrit.

Selon l’article L561-2-13° du Code monétaire et financier, sont soumis à déclaration auprès de Tracfin pour les opérations financières suspectées de blanchiment : « Les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, les avocats, les avoués près les cours d'appel, […] dans les conditions prévues à l'article L. 561-3 »

Or les avocats, au nom de leur déontologie, se refusaient de dénoncer aux autorités les clients susceptibles de blanchir de l'argent d'origine douteuse.

C’est pourquoi, l’avocat n’est pas soumis à déclaration en cas de soupçon de blanchiment dans les cas suivants :

  • lorsqu’il défend ses clients dans le cadre d'une procédure juridictionnelle
  • lorsqu’il conseille ses clients dans le cadre d’une consultation juridique, sauf si les clients souhaitent obtenir des conseils juridiques aux fins de blanchiments de capitaux

 

Par ailleurs, si déclaration il y a, l’avocat n’a jamais de relation directe avec Tracfin, puisqu’il doit adresser sa déclaration à son Bâtonnier, qui devra vérifier si les conditions d’une telle déclaration sont remplies et le cas échéant, la transmettre à Tracfin.