La demande de soins psychiatriques sur demande d'un tiers depuis le 1er aout 2011.

Publié par Sabine HADDAD le 04/09/2012 - Dans le thème :

Procédures en Justice

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Tout patient conserve un libre droit du choix de son médecin et de l’établissement de soin. L’hospitalisation sous contrainte, doit constituer de ce fait une exception au principe.

L'article 5 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme dispose :

« 1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf ... selon les voies légales ",

Pourtant la loi aura son mot à dire face à de lourdes pathologies; pour contraindre un patient aux soins en hôpital psychiatrique.

Les articles 3211-12 et suivants du code de la santé publique envisagent une nouvelle procédure depuis le 1 er août 2011 , issue de l'évolution legislative.

Dans cet article, j'aborderai uniquement l'hospitalisation sur demande d'un tiers ou en cas de péril imminent

I- L'évolution legislative: Présentation et apports de la Loi

A) L'évolution legislatives articles 3211-12 et suivants du code de la santé publiqueenvisagent une nouvelle procédure depuis le 1 er août 2011 , issue de l'évolution legislative.

Il est acquis que les troubles mentaux qui renderaient impossible le consentement et nécessiteraient des soins immédiats en milieu hospitalier, ou une protection des tiers au regard du trouble à l’ordre public, devront permettre la mise en place du dispositif légal de protéction, plus rigoureux en cas de péril imminent.

La legislation en la matière a connu diverses évolutions à près de dix années d'intervalles chacune qu’il convient de rappeler avec la :

-- loi N°90-527 du 27 juin 1990 relative aux droits et à la protection   des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation, laquelle a été  modifiée par la

--loi « Kouchner » N° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, (remplaçant, elle-même une  loi du 30 juin 1838 «  sur les aliénés »)  modifiée par la

-- loi N°2011-803 du 5 Juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques sans consentement et aux modalités de leur prise en charge en vigueur le 1er août 2011, laquelle porte principalement sur la pratique du soin psychiatrique

--Un décret N° 2011-849 du 18 juillet 2011 est relatif à la procédure judiciaire de mainlevée ou de contrôle des mesures de protection psychiatriques ;

-- article 122-1 du code pénal

« Un auteur d’infraction considéré comme atteint  au moment de la commission des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes », non accessible à une sanction pénale pourrait d'ailleurs se voir imposer une telle mesure.

B) Les apports de la Loi : La mise en place de l’hospitalisation totale ou ambulatoire et les soins sous contrainte

Aux termes anciens de « placement »,ou hospitalisation effectuée sur demande d'un tiers ; ou d'office, la loi préfère  désormais le terme de Soins psychiatriques à la demande d’un tiers, ou en cas de péril imminent…

1°- Mise en place d’une période initiale d'observation et de soins préalables par une hospitalisation de 72 heures

Cette hospitalisation permet ainsi une observation, la mise en place de soins initiaux et le cas échéant d’évaluer la nécessité de la contrainte.

a) - Mise en place d’un examen psychiatrique complet dans les 24 heures de l'admission du patient en psychiatrie .

Le  psychiatre établira  un certificat médical attestant de la nécessité ou non de poursuivre les soins sous contrainte.

b)- Etablissement d’un second certificat confirmatif de la mesure de contrainte  émanant du même médecin dans  les 72 heures de  l'admission en psychiatrie,

La forme de la prise en charge psychiatrique.

c)- confirmation par le directeur de l'établissement du choix envisagé.

2°- Les 4 formules de placements sous contrainte

a)- Les soins psychiatriques à la demande d'un tiers: la procédure de droit commun

b)- les soins psychiatriques en cas de péril imminent.

c)- les soins psychiatriques sur décision du représentant de l'État pour protection de l’ordre public

d)- Les soins psychiatriques en procédure d'urgence en cas de danger imminent pour la sûreté des personnes, attesté par un avis médical ou à défaut par la notoriété publique.

Le risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade", ( péril imminent…) sera considéré

 3°- Un suivi médical renforcé pour les patients dangereux ou irresponsables

--Un collège de 3 personnes composé d'un représentant de l'unité de soins et de 2 psychiatres dont l'un a assuré la prise en charge du malade au sein de l'établissement est amené à émettre un avis au préfet ou au JLD pour toutes décisions de modification de soin ou de sortie.

--Ce que l'on appelait aussi la "sortie d'essai" est remplacé par un suivi ambulatoire sous la responsabilité de l'établissement psychiatrique.

4°-Un contrôle systématique du Juge des Libertés uniquement pour les Hospitalisations Complètes à 15 jours et 6 mois ( voir II-B)

Avant la fin des 15 jours pour une contrainte de soins, renouvelé tous les 6 mois, pour éviter la levée de la mesure

 Un contrôle à tout moment peut s'envisager en audience publique avec audition du patient présent ou représenté au TGI, ou à défaut à l'hôpital avec visio conférence.

Le JLD ne modifie pas la mesure, il la confirme ou l'infirme.

5°-Les Commissions départementales des Hospitalisations psychiatriques sont remplacées par les commissions départementales de soins psychiatriques (CDSP)

II- Les soins psychiatriques à la demande d'un tiers

Pour l'article L3212-1 CSP Modifié par LOI n°2011-803 du 5 juillet 2011 - art. 2

I.-Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;
2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1.

A)  Une demande manuscrite et circonstanciée du tiers à l’appui d'un ou deux certificats médicaux selon la situation d'urgence.

La famille, ou tout tiers (sauf soignants de la structure d’accueil concernés), peuvent déposer une demande entièrement manuscrite, au directeur de l’hôpital, datée, signée circonstanciée, portant état civil  complet du demandeur  sa profession , sa qualité et l’état civil de la personne à hospitaliser .

1°- Le principe : l’annexe de 2 certificats médicaux

Seront nécessaires également 2 certificats médicaux circonstanciés établis par 2 médecins dont l'un n'exerce pas dans l'établissement de santé responsable du secteur géographique où s'appliquent les soins.

-L’un constatant l'état mental de la personne à soigner, sa maladie et la nécessité de la faire hospitaliser hors consentement.

-Le second, confirmant le premier, pouvant émaner d’un médecin travaillant  dans l'hôpital d’accueil.

Les deux médecins établissant ces certificats ne peuvent être parents ou alliés au 4ème degré, ni entre eux, ni avec le directeur du centre de soin, ni avec l'auteur de la demande de tiers, ni avec la personne hospitalisée.

2°- L’exception : l’unique certificat en cas de risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade pour l'HDT péril imminent (article 3212-3 du CSP)

Dans cette situation, exceptionnelle, de demande d'hospitalisation à la demande d'un tiers pour extrême urgence, le risque de péril imminent pour la santé du malade dûment constaté par le médecin, justifiera de la production d’un  seul certificat médical

En cas de "risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade", (péril imminent) un seul certificat médical pourra suffire dans un premier temps pour que le  directeur de l'établissement d'accueil  prononce  l'admission.

Cette mesure prise dans l'urgence évitera de contacter deux médecins.

Elle se fera de la même façon par une demande manuscrite du tiers, avec un certificat médical qui se réfèrera à l'article L.3212-3 du code de la santé publique.

Il faudra donc un péril imminent pour la santé de la personne, mais aussi que  son état de santé suppose des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier; mais aussi des troubles tels que le consentement aux soins est rendu  impossible

B) L’admission au centre de soins dépend du directeur de l'hôpital aux vues des pièces

1°- La remise des pièces par le tiers accompagnant

à savoir:

- une copie de la pièce d'identité du "malade"

- une pièce d'identité du tiers ayant déposé  la demande d'admission

- une demande manuscrite d'admission

-un certificat médical, daté et signé du médecin  (article L.3212-3 du CSP)

2°- confection de la fiche d'admission comportant les coordonnées du tiers, les coordonnées de la famille du malade , de son médecin…

3°- Le transport du malade sera pris en charge par le tiers ( ambulance ou voiture…)

La  personne hospitalisée dont l’état de santé s’améliorera pourra revenir au régime de l'hospitalisation libre après décision médicale.

Un arrêt de travail pourra être proposé.

C) Les certificats de maintien  de la mesure

Ils sont transmis au procureur près le  Tribunal de Grande Instance du lieu du domicile du patient et de l'hôpital (article L 3212-5 du CSP).

Il s’agit d’un :

- certificat immédiat, rédigé par un 3ème médecin (article L 3212-4 du Code de la Santé Publique)

- certificat sous 15 jours, rédigé dès le 12ème jour (article L 3212-7 al.1 du Code de la Santé Publique).

Après le cinquième jour et au plus tard le huitième jour à compter de l'admission d'une personne en soins psychiatriques, un psychiatre de l'établissement d'accueil établit un certificat médical circonstancié indiquant si les soins sont toujours nécessaires. Ce certificat médical précise si la forme de la prise en charge de la personne malade décidée en application de l'article L. 3211-2-2 demeure adaptée et, le cas échéant, en propose une nouvelle. Lorsqu'il ne peut être procédé à l'examen de la personne malade, le psychiatre de l'établissement d'accueil établit un avis médical sur la base du dossier médical. ..

- des certificats mensuellement établis (article. L 3212-7 al.2 du Code de la Santé Publique).

..Au vu du certificat médical ou de l'avis médical mentionné au premier alinéa du présent article, les soins peuvent être maintenus par le directeur de l'établissement pour une durée maximale d'un mois. Au-delà de cette durée, les soins peuvent être maintenus par le directeur de l'établissement pour des périodes maximales d'un mois, renouvelables selon les modalités prévues au présent article ; le certificat est établi dans les trois derniers jours de la période en cause.

- au delà d'un an (article. L 3212-7 al.3 et 4 du Code de la Santé Publique).

Lorsque la durée des soins excède une période continue d'un an à compter de l'admission en soins, le maintien de ces soins est subordonné à une évaluation approfondie de l'état mental de la personne réalisée par le collège mentionné à l'article L. 3211-9. Ce collège recueille l'avis du patient. En cas d'impossibilité d'examiner le patient à l'échéance prévue en raison de son absence, attestée par le collège, l'évaluation et le recueil de son avis sont réalisés dès que possible.
Le défaut de production d'un des certificats médicaux, des avis médicaux ou des attestations mentionnés au présent article entraîne la levée de la mesure de soins.
Les copies des certificats médicaux, des avis médicaux ou des attestations prévus au présent article et à l'article L. 3211-11 sont adressées sans délai par le directeur de l'établissement d'accueil au représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, au préfet de police, et à la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l'article L. 3222-5. Lorsque la personne malade est prise en charge sous la forme d'une hospitalisation complète, une copie du certificat médical ou de l'avis médical mentionnés au premier alinéa du présent article est également adressée sans délai au juge des libertés et de la détention compétent dans le ressort duquel se trouve l'établissement d'accueil.

D) Le rôle de contrôle du juge des libertés et de la détention

1°- Une saisine de tous les instants

Comme son nom l'indique, ce JLD peut être saisi à tout instant  et par tous moyens pour statuer sur la levée de l'hospitalisation, dans le cadre d'une audience publique qui se tiendra au sein du tribunal de grande instance compétent, ou parfois au sein de l'hôpital ( visio-conférence).

Cela suppose en principe l'audition du malade, lequel pourra se faire assister  voir représenter par un conseil commis d'office.

Dans tous les cas, le JLD annulera ou confirmera la décision sans pouvoir la modifier.

2°- Un contrôle obligatoire

- avant la fin des 15 jours suivant  l'application de la contrainte de soins en hospitalisation  psychiatrique civile et 6 mois en matière pénale

- renouvellement du contrôle tous les 6 mois pour éviter la levée de la mesure

Demeurant à votre entière disposition pour toutes précisions en cliquant sur http://www.conseil-juridique.net/sabine-haddad/avocat-1372.htm

Sabine HADDAD

Avocate au barreau de Paris