Prises d'otages : l'Etat français pourra demander le remboursement des frais de libération

Publié par Documentissime le 13/07/2010 | Lu 7243 fois | 0 réaction

Alors que deux journalistes de France 3, Hervé Ghesquière et Stéphane Taponier, sont toujours retenus en otage en Afghanistan, et ce depuis plus de six mois, le Parlement français vient d'adopter un projet de loi visant à ce que les otages ayant pris des risques remboursent les frais engagés par l'Etat français pour leur libération. Cette mesure vise à décourager les aventuriers de visiter les zones à risque, comme c'est déjà le cas en Allemagne et en Suisse. Le Ministre des affaires étrangères a cependant annoncé que les journalistes et les humanitaires n'étaient pas concernés par la mesure.

 

Un projet de loi adopté mais critiqué

Une Commission Mixte Paritaire (CMP) s’est réunie jeudi. Composée de sept députés et de sept sénateurs, elle a mis au point un texte qui vient d’être voté par le Sénat, puis par l’Assemblée Nationale.

Ainsi, le Parlement français a adopté un projet de loi qui prévoit que, dans certains cas, les otages retenus à l’étranger, devront rembourser les frais engagés par l’Etat français pour les libérer.

 

Concrètement, le projet de loi dispose que « l'Etat peut exiger le remboursement de tout ou partie des dépenses qu'il a engagées ou dont il serait redevable à l'égard de tiers à l'occasion d'opérations de secours à l'étranger au bénéfice de personnes s'étant délibérément exposées […] à des risques qu'elles ne pouvaient ignorer ».

 

Alors que les groupes UMP (Union pour un Mouvement Populaire) et NC (Nouveau Centre) ont voté pour l’entrée en vigueur de ce texte, les groupes PS (Parti Socialiste) et de la Gauche Démocrate et Républicaine (GDR) ont voté contre.

 

Comme la gauche, les associations humanitaires critiquent l’entrée en vigueur d’une telle mesure. En effet, pour ces opposants, ce n’est pas aux victimes de prises d’otages de supporter les coûts de leur libération, qui sont généralement des sommes importantes, et ce, quelles que soient les raisons pour lesquelles ils ont été enlevés, et qu’ils aient pris des risques à titre professionnel, ou non.

 

 

Certains otages seront épargnés

L’article 13 du projet de loi, adopté par le Sénat et l’Assemblée Nationale en 1ère, dispose que « L'Etat peut exiger le remboursement de tout ou partie des dépenses qu'il a engagées ou dont il serait redevable à l'égard de tiers à l'occasion d'opérations de secours à l'étranger au bénéfice de personnes s'étant délibérément exposées, sauf motif légitime tiré notamment de leur activité professionnelle ou d'une situation d'urgence, à des risques qu'elles ne pouvaient ignorer ».

La liste des personnes concernées par l’exonération de responsabilité n’est pas mentionnée dans le projet de loi adopté mais fera sans doute l’objet de précisions au sein d’un décret d’application publié prochainement.

En effet, bien que les deux assemblées aient adopté cet article, des interrogations et des critiques persistent au sujet de son interprétation.

 

Afin de calmer la polémique, Bernard Kouchner, Ministre des Affaires étrangères, a affirmé que cette mesure ne concernait ni les journalistes, ni les humanitaires, qui bénéficient en effet d’un motif légitime tiré de leur activité professionnelle.

Un décret d’application permettra d’y voir plus clair à propos des personnes exonérées du remboursement des frais de libération et de dessiner les contours de cette nouvelle option laissée à l’Etat français, notamment s’agissant du type de frais qui pourront être demandés aux otages.

 

Rappelez vous, l’an passé ; des touristes français avaient ignoré les avertissements du Quai d’Orsay et s’étaient aventuré au large des côtes somaliennes, où ils avaient été interceptés par des pirates armés. Leur libération avait généré des frais importants. Si cela avait lieu aujourd’hui, ils auraient sans doute été sommés de rembourser ces frais à l’Etat français…