Nuage volcanique : principe de précaution et conséquences pour les voyageurs

Publié par Documentissime le 21/04/2010 | Lu 6940 fois | 0 réaction

Le volcan islandais Eyjafjöll est entré en éruption une première fois, le 20 mars 2010, puis le 14 avril. Le réveil de ce volcan a causé un nuage de cendres volcaniques dans le ciel, lourd de conséquences pour les compagnies aériennes et leurs usagers. En raison du principe de précaution, la suspension d'une partie du trafic aérien a été décidée et de nombreuses personnes se sont ainsi retrouvées bloquées à l'étranger. La gestion de cette éruption volcanique a fait naître des critiques et des questions relatives notamment à l'hébergement et au droit du travail (salaire, absences).

Le trafic aérien se trouve paralysé dans le nord de l’Europe du fait de la récente éruption d’un volcan islandais. Ce réveil volcanique, dû à l’entrée en contact de magma et d’un glacier, a provoqué des panaches de vapeurs et de cendres. En France, 25 aéroports français, notamment ceux de Roissy et d’Orly, sont fermés depuis plusieurs jours. 63.000 vols auraient été annulés depuis le 14 avril 2010.

Cinq jours après le début de la seconde éruption volcanique, les compagnies aériennes critiquent la gestion de celle-ci par les Gouvernements. « Nous sommes assez avancés dans cette crise pour exprimer notre insatisfaction sur la façon dont les gouvernements l'ont gérée », a par exemple précisé le directeur de l'Association internationale du transport aérien (IATA).

 

Le principe de précaution

La principale raison de cet emportement repose sur la mise en avant du principe de précaution par les Etats et les conséquences financières que les suspensions de vols ont générées. En effet, dès la publication mercredi dernier d'un communiqué des services météorologiques britanniques, ce principe de précaution a perturbé le trafic aérien.

« La proximité d'un nuage de cendres pourrait très sévèrement limiter la visibilité et représenter un danger pour les réacteurs des appareils », avait alors prévenu le Met Office.

Cette information a été le déclencheur de nombreuses fermetures d’aéroports. La Norvège a en effet immédiatement décidé de la fermeture progressive de son espace aérien. L’Ecosse, la Suède, le Danemark, la Grande-Bretagne, la France ont suivi en tout ou partie. Le Nord de l’Europe a alors connu une paralysie de son espace aérien.

Depuis ce week-end, des vols-tests sont réalisés et progressivement, certains aéroports rouvrent, notamment ceux des pays de l’Est de l’Europe (Russie et Hongrie). En France, la plupart des aéroports resteront fermés jusqu'à demain matin 9h (au moins) au Nord d'une ligne Nice-Bordeaux. Au sud de cette ligne, en revanche, le trafic aérien est maintenu.

Le principe de précaution a justifié ces perturbations du trafic aérien mais aujourd’hui, il est à l’origine de nombreuses critiques.

Le principal syndicat de pilotes d'Air France estime par exemple qu'il est désormais nécessaire de présenter des « éléments tangibles et concrets » afin déterminer si le nuage de cendres est encore dangereux ou non pour les passagers des vols.

La compagnie aérienne a réalisé hier des vols-tests à basse altitude et demande une réévaluation des restrictions de vols en tenant compte de l’évolution de ces derniers jours.

Il semble pour beaucoup qu’il était normal et justifié d'invoquer le principe de précaution dans les heures suivant l’éruption volcanique mais qu’à présent, l’interruption des vols doit être réévaluée. Il serait même nécessaire pour certains pilotes d’effectuer des recherches plus approfondies.

Les réactions suscitées par cette interruption du trafic rappellent celles ayant suivi la gestion de la Grippe A par l’Etat français. Le principe de précaution avait également été mis en avant afin de justifier l’achat massif de vaccins et les mesures sanitaires prises en conséquence.

Tout repose sur la juste appréciation, le calcul à effectuer entre d’un côté, privilégier la santé et la sécurité des citoyens, et de l’autre, maintenir les habitudes et limiter les pertes économiques… Même si les retards et les annulations de vols sont lourdes de conséquences, les personnes concernées, au regard des risques pour leur santé et leur sécurité, préfèreraient sans doute rester bloquées à l’aéroport, plutôt que de prendre un vol dans de telles conditions.

 

Le nuage volcanique et les risques pour la santé

Le nuage volcanique serait plus dangereux pour l’aviation que pour l’être humain. Pour le vulcanologue Jean-Marie Bardintzeff, « ces particules fines contenues dans le nuage de cendres ressemblent en quelque sorte à du verre pilé, c'est très coupant. Mais les cendres sont tellement diluées qu'il n'y a pour l'instant aucun danger pour l'homme. En revanche c'est ennuyeux pour les avions parce que leurs réacteurs sont sensibles et lorsque ces particules sont en altitude  elles peuvent endommager les appareils et agresser les cockpits et les hublots des avions. L'aviation est donc plus vulnérable que l'homme. »

 

Quelles conséquences pour les salariés bloqués ?

De nombreux salariés sont absents aujourd’hui de leur entreprise, coincés à l'étranger en raison des annulations de vols. Peuvent-ils prétendre à un maintien de leur rémunération ou ces journées de travail sont-elles perdues ?

Il faut distinguer plusieurs situations, notamment celle des salariés qui se trouvaient en congés payés et qui reprendront le travail avec quelques jours de retard et celle des salariés en déplacement professionnel.

La plupart des salariés absents sont, en effet, des salariés qui se trouvaient en période de congés. Ce sont donc des touristes et non des salariés en déplacement professionnel. Au niveau de la rémunération, ils ne peuvent à ce titre prétendre à un maintien de salaire. Le ou les jours perdus pourront en revanche être décomptés des congés annuels afin d’éviter une perte de revenus.

Concernant les absences justifiées par le blocage du trafic aérien, l’employeur ne peut sur ce fondement motiver une quelconque sanction ou rupture du contrat de travail.

 

Le problème de l’hébergement

Des cellules d'accueil et d'informations « ont été montées pour se mobiliser au maximum pour faciliter la solution » des problèmes qui se posent pour les personnes bloquées à l’étranger.

De même, concernant les étrangers qui cherchent à quitter la France, Dominique Bussereau a annoncé des hébergements gratuits en France. Le gouvernement doit les instaurer prioritairement « pour des gens qui n'ont plus d'argent pour aller à l'hôtel ».

Il semble également que les consulats, ambassades et autres services tentent de prendre des mesures provisoires alors que la solidarité sur place se met parfois en œuvre, comme c’est le cas en Martinique où des locaux acceptent d’héberger des personnes en difficultés suite à l’annulation de leur vol.

Des aéroports militaires pourraient être utilisés pour rapatrier des voyageurs victimes des perturbations du trafic aérien, de même que des cars, des bus ou autres moyens de transports disponibles pourraient servir de solution de remplacement. Un recensement des Français bloqués à l'étranger a commencé afin de permettre un rapatriement dans les plus brefs délais.