La question prioritaire de constitutionnalité, un nouveau recours pour les justiciables depuis le 1er mars 2010

Publié par Documentissime le 19/04/2010 | Lu 6844 fois | 0 réaction

La question prioritaire de constitutionnalité est issue de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui a intégré un nouvel article 61-1 à la Constitution française. Depuis le 1er mars 2010, tout justiciable bénéficie d'une voie de droit supplémentaire lui permettant d'invoquer l'inconstitutionnalité d'une disposition législative dans le cadre d'une procédure en cours devant une juridiction de premier ou second degré voire de cassation.

Conditions de la question prioritaire de constitutionnalité

La loi organique du 10 décembre 2009 est venue préciser les modalités d’application de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC), complétée par deux décrets du 16 février 2010, l’un relatif à la procédure, l’autre à l’aide juridictionnelle. 

Depuis le 1er mars 2010, tout justiciable a la possibilité de contester la constitutionnalité de dispositions législatives applicables au litige en cours. Le nouvel article 61-1 de la Constitution dispose en effet que lorsqu’à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. 

Il est donc nécessaire qu’il y ait violation d’une disposition législative portant atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, que cette violation soit soulevée dans le cadre d’une instance en cours et que la juridiction devant laquelle se déroule ladite instance décide de renvoyer la question à la Cour de cassation ou au Conseil d’Etat, filtre obligatoire avant l’examen de la question prioritaire de constitutionnalité par le Conseil constitutionnel. 

 

Procédure de la question prioritaire de constitutionnalité 

La question prioritaire de constitutionnalité doit être soulevée par écrit à peine d’irrecevabilité, lequel doit être motivé et distinct des conclusions au fond.

Lorsque la question est transmise aux juridictions supérieures, le juge du fond saisi doit alors surseoir à statuer jusqu’à réception de la décision du Conseil d’État ou de la Cour de cassation ou, si elle lui a été adressée, du Conseil constitutionnel. En revanche, si la question est posée dans le cadre d’une instance où la liberté d’une personne est en jeu ou au cours d’une instruction, le juge n’est pas soumis à un sursis à statuer (article 23-3 de la loi organique).

Un double filtrage est effectué dans le cadre de la procédure d’examen de la question prioritaire de constitutionnalité.

Dans un premier temps, le juge devant lequel se déroule l’instance doit déterminer s’il transmet ou non la question du justiciable à la Cour de cassation ou au Conseil d’Etat. Si les conditions de la QPC sont réunies, il doit transmettre, sans délai, la question à l’une de ces deux juridictions, selon qu’il s’agit de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif.

Dans un second temps, le Conseil d’Etat ou la Cour de cassation devront, de nouveau, vérifier si les conditions de la QPC sont rassemblées, notamment si la juridiction qui les a saisi a convenablement apprécié ces conditions et si la question est bien nouvelle ou présente un caractère sérieux.

Si la QPC est transmise au Conseil constitutionnel, ce dernier la reçoit accompagnée des mémoires ou des conclusions des parties et la juge, dans un délai de trois mois, dans le cadre d’une procédure contradictoire et en audience publique (sauf cas exceptionnels définis par son règlement intérieur).

La saisine doit être motivée, de même que pour le premier filtre (article 23-7 de la loi organique).

Le Conseil constitutionnel pourra déclarer la disposition conforme à la Constitution ou contraire à celle-ci. Dans le premier cas, la disposition objet du recours continuera à s’appliquer et l’instance au cours de laquelle la QPC a été soulevée reprendra son cours. Dans le second cas, la déclaration d’inconstitutionnalité entraînera l’abrogation de la disposition législative.

Depuis le 1er mars, cette procédure a été mise en œuvre à plusieurs reprises, notamment devant le Tribunal correctionnel de Lyon, devant le Tribunal de grande instance (TGI) de Paris et devant les tribunaux administratifs de Montreuil et de Cergy-Pontoise.