Houellebecq, Séraphine : oeuvres de génies ou simple copier-coller ? C'est au juge de trancher !

Publié par Documentissime le 29/11/2010 | Lu 7581 fois | 0 réaction

« Séraphine », « la carte et le territoire » : deux oeuvres de l'esprit, la première cinématographique et la seconde littéraire, protégées par le droit d'auteur. L'une comme l'autre s'inspirent pourtant d'idées n'appartenant pas à leurs auteurs. Mais protéger une idée reviendrait à poignarder la création. Dans quelle mesure Michel Houellebecq peut-il enfanter un roman, s'il ne peut puiser ses sources par exemple dans une notice informatique ? Comment peut-on écrire un scénario autour d'une personnalité, tel que Séraphine, sans s'inspirer du travail du biographe de ladite personnalité ? Dans de tels cas, c'est au juge de déterminer la frontière entre l'inspiration légitime de faits réels ou imaginaires et le véritable plagiat, susceptible de donner lieu à l'octroi de dommages et intérêts.

Le livre  « la carte et le territoire » de Houellebecq : victime de la rumeur de plagiat

Polémique autour du dernier livre de Michel Houellebecq : l’auteur est accusé de plagiat. « La carte et le territoire » (Flammarion), sélectionné pour le prix Goncourt 2010 reprendrait des passages empruntés à Wikipédia, ou encore au site du Ministère de l’intérieur. Pour Michel Houellebecq, cette accusation est ridicule. Pour Wikipédia en revanche, les emprunts semblent « réels ». Le roman devrait paraître mercredi 8 septembre. Alors : génie ou simple copier-coller ? Coup de pub ou sabotage ?

Documentissime s’était interrogé à la rentrée sur la nature contrefaisante ou non de l’œuvre du célébrissime auteur de romans à succès.

http://www.documentissime.fr/profil/alice-thourot/article-505-dernier-houellebeck-copier-coller.html

A propos de cet article, l’un de nos lecteurs conseillait à l’auteur incriminé, de publier gratuitement son roman « la carte et le territoire » sur le site Wikipedia.

Les éditeurs, sites et blogs de la toile, n’ont pas attendu la réponse de Houellebecq à notre lecteur et se sont emparés de son « idée », en proposant gratuitement aux internautes le dernier roman du prix Goncourt.

Le fait que l’auteur de « La Carte et le territoire » soit mêlé à une affaire de plagiat semble avoir incité internet à diffuser son œuvre sans son autorisation. Or en aucun cas, un roman peut-être mis en ligne sans l’autorisation de son auteur et son éditeur.

Flammarion, l’éditeur de l’ouvrage n’entend pas que le piratage se propage, et a annoncé vendredi dernier avoir adressé des mises en demeure aux sites et blogs diffusant le roman. Si ces mises en demeure restent vaines, Flammarion portera l’affaire devant les tribunaux.

Aujourd’hui, l'intégrale de Houellebecq peut être téléchargé librement : «Ce type de téléchargement est évidemment illégal, il contrevient aux principes élémentaires du droit d'auteur, qui doit être respecté dans l'univers numérique comme dans l'univers papier», s’insurge Flammarion

Le film « Séraphine » de Martin Provost, 7 César et une contrefaçon…

Concernant le film Séraphine, les juges ont estimé qu’il s’agissait là d’une véritable contrefaçon.

Vendredi 26 novembre 2010, le Tribunal de Grande Instance de Paris a condamné solidairement le producteur et le scénariste du film au paiement de 50 000 euros pour contrefaçon, à partager en parts égales entre l’auteur et l’éditeur de l’œuvre originaire.

En effet, le scénario du film Séraphine ne s’était pas contenté de s’inspirer de l’œuvre d’Alain Vircondelet, spécialiste de Séraphine Louis, célèbre peintre française, mais avait à 9 reprises repris quasiment à l’identique l’œuvre première. « On note une similitude dans la formulation employée, parfois au mot près, ce qui permet d'exclure la simple réminiscence derrière laquelle se retranchent les défendeurs », avaient énoncé les juges de première instance.

Une fois la contrefaçon établie, le producteur et le scénariste du film ont ainsi été condamnés au versement de dommages et intérêts à Monsieur Vircondelet, pour atteinte au droit moral de son œuvre, et à l’éditeur Albin Michel pour atteinte à son droit patrimonial. Albin Michel, avait publié la biographie d’Alain Vircondelet, et ce dernier lui avait cédé ses droits.  

Plagiat et contrefaçon

Selon le code de la propriété intellectuelle, la propriété littéraire comprend l’ensemble des prérogatives d’ordre moral (droit de divulgation, de paternité, droit au respect, au retrait et au repentir) et d’ordre patrimonial (ou pécuniaire), reconnues aux auteurs d’œuvres de l’esprit.

En matière de propriété littéraire, le droit français est protecteur, pourvu que l’œuvre soit mise en forme : ainsi la simple idée n’est pas protégeable.

L’article L122-4 dispose que : « Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque. ».

Un plagiat, qui consiste à s'inspirer d'un modèle que l'on omet délibérément ou par négligence de désigner est une contrefaçon lorsque les ressemblances entre l’œuvre plagiée et l’œuvre auteur du plagiat sont telles que l’impression d’ensemble est identique.

Toutefois, la limite entre l'inspiration, l'imitation et la contrefaçon reste parfois mince et difficile à déterminer …