L'article l. 1224-1 du code du travail transfère au nouvel employeur les contrats individuels mais il ne transfère pas le statut collectif

Publié par Jean-pierre DA ROS le 09/06/2011 - Dans le thème :

Emploi et vie professionnelle

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Devenir des conventions et accords collectifs lors d'un transfert d'entreprise

L'article L. 1224-1 du Code du travail transfère au nouvel employeur les contrats individuels mais il ne transfère pas le statut collectif  . Toutefois, les règles normales de détermination de la convention collective subsistent .

Reste à savoir ce que deviennent les conventions collectives préexistantes.

Principe de non-transmissibilité : limites

Le contrat de travail, s'il crée une relation individuelle entre un employeur et un salarié, introduit, en outre, ce salarié dans une collectivité de travail. L'appartenance à cette collectivité soumet le salarié à un statut collectif qui est déterminé par la convention collective professionnelle, éventuellement la convention collective d'entreprise, et par les actes unilatéraux par lesquels l'employeur a pu introduire certaines règles, accorder certains avantages, ceci, au-delà de ce fond commun que constituent les dispositions légales.

L'article L. 1224-1 du Code du travail a pour effet de transférer à un nouvel employeur les contrats de travail. Qu'advient-il du statut collectif ? Est-il transféré en même temps que les contrats de travail ? Le principe est que la continuité de la relation salariale posée par l'article précité n'emporte pas le transfert du statut collectif qui résultait de l'application de la convention collective professionnelle liant l'ancien employeur. Le statut collectif ne s'incorpore pas au contrat de travail, il l'encadre. Tout dépend cependant des normes concernées.

Règle légale : le maintien des contrats

La fusion-absorption est l'un des cas mettant en jeu l'article L. 1224-1 du Code du travail (ancien article L. 122-12, alinéa 2)  (voir no 1958 et s.) .

Cet article prévoit qu'en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur (la fusion-absorption en est incontestablement une), tous les contrats en cours au jour de la modification subsistent entre les salariés et le nouvel employeur.

Les salariés qui restent dans la nouvelle entreprise conservent :

- leur ancienneté ;

- les avantages inscrits dans leur contrat.

De ce principe découlent plusieurs conséquences :

a) Eventualité de mise en cause des accords collectifs

La convention collective ou l'accord collectif peuvent être mis en cause par le transfert d'entreprise (C. trav., art. L. 2261-14). La Cour de cassation décide que la cession d'une entité économique autonome entre dans les prévisions de ce texte (Cass. soc., 24 févr. 1993, no 90-40.104, Bull. civ. V, no 67 ; Cass. soc., 31 janv. 2001, no 99-60.378, Bull. civ. V, no 31, JSL, no 80-4, à propos d'une activité sous-traitée à une autre société du même groupe ; Cass. soc., 21 oct. 2008, no 08-60.008, à propos du transfert de deux établissements d'une UES à une société tierce à cette UES : l'arrêt décide que l'accord collectif mis en cause, relatif au nombre de délégués syndicaux pouvant être désignés par établissement, continue à s'appliquer aux établissements cédés pendant 15 mois après le transfert).

Il en résulte que si le transfert porte sur une entité économique autonome, représentant tout ou partie de l'activité du cédant, les salariés passés au service du repreneur bénéficient du régime juridique de la mise en cause de la convention collective qui les gouvernait.

b) Situations possibles

Le transfert d'entreprise entraîne parfois la caducité de l'accord collectif ce qui justifie le refus du repreneur de l'appliquer. Il en est ainsi lorsque l'accord de réduction du temps de travail accompagné d'un engagement de création d'emplois (accord « offensif » de la loi Robien du 1er juin 1997) n'a plus d'objet à la suite du redressement judiciaire de l'entreprise accompagné d'un plan de cession : ce plan prévoyant des licenciements, il entraînait la disparition des aides publiques ce qui rendait l'accord collectif caduc (Cass. soc., 17 juin 2003, no 01-15.710).

Le plus souvent, cependant, la convention ou l'accord collectif a vocation à se maintenir, au moins temporairement, en faveur du personnel transféré :

le transfert des contrats associés à l'activité cédée n'entraîne pas forcément une modification de la convention collective. Si l'activité principale est la même et que l'ancien employeur était lié par une convention collective de branche, le nouvel employeur le sera également ;

dans la majorité des cas, toutefois, un ou plusieurs accords d'entreprise se superposeront à la convention de branche et c'est à ce niveau que se posera le problème ;

enfin, l'on ne saurait écarter l'hypothèse où les deux employeurs successifs, faute d'avoir la même activité principale, ne relèveraient pas de la même convention collective de branche.