De la validitié d'un cdd de remplacement d'un salarié absent de son poste habituel mais travaillant toujours

Publié par Sébastien CHARRIÈRE le 23/07/2010 | Lu 7584 fois | 0 réaction

Le recours aux contrats à durée déterminée (CDD) se doit d'être une exception. Le principe est le contrat à durée indéterminée (CDI) et le code du travail ne prévoit la possibilité de conclure un CDD que dans des conditions strictement limitées et à la condition que son utilisation soit dument justifiée et que le contrat n'a pas pour objet ou pour effet de pourvoir durablement à un emploi. Dans le cas contraire, c'est la requalification du CDD en CDI qui pend au nez de l'employeur ne respectant pas l'essence de cette forme de contrat.

Le contentieux en la matière est foisonnant mais ce n’est rien à côté de ce que la pratique quotidienne ne conduit jamais jusqu’à la porte des juges. Le 13 juillet dernier, la chambre sociale de la Cour de cassation, saisie d’une demande de requalification d’un CDD en CDI, s’est posée la question de savoir si un CDD conclu pour le remplacement d’une salariée non absente mais affectée à un autre site pour cause de surcharge de travail pouvait justifier sa requalification en CDI

Le CDD pour remplacement, comme son nom l’indique, est un CDD conclu afin d’assurer le remplacement d’un salarié absent. Cette absence peut être le fait d’une maladie, de la prise de congés payés, d’un congé maternité, d’un congé parental, d’une formation, etc. Dans l’affaire qui nous intéresse, une salariée est recrutée en CDD afin de pourvoir un remplacement pour des tâches de secrétariat dans une structure de service de santé au travail (la médecine du travail). Elle réalise plusieurs remplacements de salariés en congé parental, en congé maternité ou en arrêt maladie et enchaine ses deux derniers remplacements coup sur coup avec pour dernier contrat le remplacement d’une salariée revenue de maladie mais ensuite affectée sur un autre site pour aider celui-ci suite à une surcharge de travail.

Pensant certainement avoir trouvé un gros poisson à ferrer, la salariée saisit le juge prud’homal en vue de la requalification de ce dernier CDD en CDI. Dans un premier temps, le conseil des prud’hommes ne fait pas droit à sa demande de requalification. Elle interjette donc appel et la Cour d’appel, contrairement à ce qui a été rendu en 1ère instance, décide effectivement de requalifier le contrat en CDI en notant que l’affectation provisoire de la salariée remplacée sur un autre site était due à une surcharge de travail et que dans ce cas le CDD était conclu pour surcroît d’activité. De ce fait, un délai de carence aurait du être respecté entre les deux contrats sur le même poste, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce.

En effet, il faut savoir qu’entre deux CDD sur un même poste, un délai de carence doit être respecté avant la conclusion du second, sauf lorsqu’il s’agit de deux CDD de remplacement de la même personne de nouveau absente. En l’occurrence, la Cour d’appel n’a pas considéré que le second CDD se justifiait par l’absence de la salariée puisqu’elle travaillait toujours, même s’il s’agissait d’un autre site.

Le service de santé au travail concerné a décidé de former un pourvoi en cassation et, la chambre sociale est revenue à la décision du conseil des prud’hommes en estimant que la requalification du second CDD en CDI n’a pas à avoir lieu puisque, en vertu du Code du travail, « l'autorisation de recourir à un contrat à durée déterminée de remplacement en cas d'absence temporaire d'un salarié s'entend de son absence aussi bien de l'entreprise que de son poste habituel de travail ».

Cass. Soc. 13 juillet 2010, n°09-40600, publié au bulletin.