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Droit du travail

Faute grave
Licenciement et rupture conventionnelle

Bonjour, J'aimerai connaître les possibilités de quitter son emploi sans démissionner et dans le cas où une rupture conventionnelle n'est pas acceptée par l'employeur. Un abandon de poste constitue-t-il une faute grave ? Quelles sont les cas où une faute simple peut être évoquée et donne t-elle droit aux indemnités de licenciement, de congés et au chômage ?
Merci par avance, S


Question posée le 08/06/2011

Par Sylvie

Département : Hauts-de-Seine (92)


Mots clés de cette question :abandon de postecause réelle et sérieuseconditionsdémission.faute gravefaute légèrefaute lourdegravité de la fautelicenciementprescription de la faute.
Date de la réponse : le 08/06/2011

Bonsoir,
Effectivement l'abandon de poste reste la dernière solution. C'est une faute grave qui vous prive de toutes les indemnités (licenciement et préavis),exeptés les congés payés. Vous aurez aussi droit aux indemnités de pôle emploi. Il n'y a pas possibilité de faute légère dans votre cas si vous quittez votre entreprise sans autorisation. La faute légère donne droit aux indemnités mais ce sont les juges de fond qui qualifient la faute en fonction de son niveau de gravité en se basant sur les jurisprudences. La faute lourde (faute grave avec intention de nuire à l'employeur) vous prive en plus des indemnités de congés payés pour l'année en cours mais vous donne droit cependant aux indemnités de pôle emploi. Seule la démission vous prive de ces dernières.
Cordialement,

Date de la réponse : le 09/06/2011

Bonjour,

Je ne suis pas entièrement d'accord avec la réponse un peut trop théorique apportée par M. DA ROS.

Tout d'abord le licenciement pour abandon de poste n'est pas automatique, il faut le savoir.

L'employeur n'est pas tenu de licencier un salarié : il peut le laisser très longtemps "entre deux" : le salarié ne se présente pas à son travail, mais il n'est pas démissionnaire, et s'il n'est pas licencié son absence ne coûte rien à l'employeur... il n'est donc pas éligible à l'inscription au Pôle emploi, et encore moins au bénéfice des indemnités de chômage.

Ensuite, faute grave ? tout dépendra de la réaction de l'employeur. L'abandon de poste constituera nécessairement une cause réelle et sérieuse de licenciement, à condition que l'employeur ne se précipite pas pour licencier dès les premiers jours d'absence ("précipitation fautive" qui pourrait priver le licenciement de motif).

Pour passer à la faute grave il faudra à mon sens que l'employeur mette d'abord en demeure son salarié, passé les deux premiers jours d'absence, soit de justifier de son absence, soit de reprendre son travail dès réception de la mise en demeure.

Bien Cordialement,

Date de la réponse : le 11/06/2011

Je ne sais pas si vous estimez aussi que j'ai été trop théorique, si c'est le cas je vous apporte plus de précisions sur la question. J'essaye d'être bref pour pouvoir répondre à un maximum de questions mais je peux entrer plus dans les détails si nécéssaire.

Il peut effectivement arriver que l'employeur laisse perdurer la situation.
Mais le régime du droit disciplinaire est indissociable de la notion de faute.

Pour présenter les règles du droit disciplinaire, l'article L. 1331-1 du Code du travail part de la notion de sanction - ' Constitue une sanction toute mesure (') prise par l'employeur à la suite d'un agissement considéré par lui comme fautif ' ' sans définir ce que recouvre la notion d'' agissement fautif '.

Il importe pourtant de cerner au plus près la notion de faute susceptible de donner lieu à une sanction disciplinaire, et pas seulement en raison du régime procédural auquel celle-ci est soumise.
En effet, si le fait allégué est dépourvu de caractère fautif, la sanction n'est pas justifiée.

Or depuis une évolution majeure de la jurisprudence amorcée en 1999, cette considération emporte de graves conséquences lorsque la sanction prend la forme d'un licenciement puisqu'une erreur dans la qualification du manquement reproché au salarié rend purement et simplement le licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 9 mai 2000, no 97-45.163, Bull. civ. V, no 170 ; Cass. soc., 2 juill. 2002, no 00-40.925, no 2234 F-D).

Votre cas se rattache à un manquement à la discipline et inexécution fautive du contrat de travail.

Relève incontestablement du droit disciplinaire tout manquement :

- aux règles de discipline et d'organisation collective du travail énoncées dans le règlement intérieur (respect des horaires, des consignes d'hygiène et de sécurité, justification des absences') ainsi qu'aux obligations qui découlent du lien de subordination et de l'appartenance du salarié à une communauté de travail (respect des directives et instructions de l'employeur, devoir de correction') ;

- à l'obligation générale de loyauté qui interdit au salarié de se livrer à des agissements moralement et/ou pénalement répréhensibles (notamment obligation de fidélité, de discrétion et de réserve).

Il n'y aura faute susceptible d'être sanctionnée sur le terrain disciplinaire que si l'exécution défectueuse est due à l'abstention volontaire du salarié ou à sa mauvaise volonté délibérée (Cass. soc., 31 mars 1998, no 95-45.639, Bull. civ. V, no 186 ; voir également Cass. soc., 19 juin 2002, no 00-43.602, no 2113 F-D, à propos d'une insuffisance de production). Ce qui serait le cas si vous vous absteniez de justifier votre absence.


La faute disciplinaire est constituée par la violation des règles de discipline de l'entreprise. Le licenciement peut être la sanction ultime des agissements fautifs du salarié.

La non-exécution d'une de ses obligations par le salarié est constitutive d'une faute légère, sérieuse, grave ou lourde, selon la nature du manquement et les circonstances.

C'est à l'employeur de déterminer si le salarié a commis une faute et d'apprécier la gravité de cette faute. Ce sont les juges qui la qualifieront in fine.

Or, il n'existe aucun ' catalogue ' législatif ou réglementaire prédéterminant les fautes qui seraient par nature lourdes, graves ou simples. Une appréciation au cas par cas est donc nécessaire.

Selon les circonstances, la fonction de l'intéressé ou son niveau de formation, la faute sera constitutive d'une cause réelle et sérieuse de licenciement. L'employeur pourra opter toutefois dans le cadre de son pouvoir disciplinaire pour une sanction moindre que le licenciement pour motif disciplinaire.

- d'une faute grave privative de l'indemnité de préavis et de l'indemnité de licenciement (voir no 2575 , no 2624 ; C. trav., art. L. 1234-1 ; C. trav., art. L. 1234-9) ;
- d'une faute lourde privative de toute indemnité y compris de l'indemnité compensatrice de congés payés (C. trav., art. L. 3141-26).

A noter que la faute légère, qui peut justifier des sanctions disciplinaires d'une gravité moindre, ne permet pas de rompre le contrat de travail. Tel est généralement le cas lorsque le comportement reproché au salarié est ponctuel, inhabituel, excusé par les circonstances et ne nuit pas durablement au fonctionnement de l'entreprise. Seule la faute au moins sérieuse peut donc justifier un licenciement disciplinaire.

La jurisprudence nous permet de mieux cerner ces notions.

Notion de faute grave:
Selon la Cour de cassation, la faute grave est définie comme la faute qui ' résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ' (Cass. soc., 26 févr. 1991, no 88-44.908, Bull. civ. V, no 97). C'est le cas en général de l'abandon de poste !

En d'autres termes, la faute grave est celle qui justifie la cessation immédiate du contrat de travail sans préavis.
C'est donc cette seule considération qui doit guider l'employeur pour apprécier s'il y a, ou non, faute grave.



En d'autres termes, la faute grave implique nécessairement une rupture immédiate.


Il appartient au juge d'apprécier la gravité de la faute.

La faute grave implique une réaction immédiate de l'employeur (Cass. soc., 13 déc. 1984, no 82-41.380 ; Cass. soc., 22 oct. 1991, no 90-40.077). En effet, en ne sanctionnant pas immédiatement la faute, l'employeur la tient pour insuffisamment grave et le tribunal est fondé à se référer à cette appréciation pour contester la légitimité du licenciement immédiat, décidé ' à retardement '.

C'est pour cela que je vous ai précisé que le licenciement dans votre cas serait quasi-certain. Des agissements longuement tolérés ne sauraient donc être invoqués (Cass. soc., 16 juill. 1987, no 84-44.875, Bull. civ. V, p. 310 ; Cass. soc., 21 févr. 1991, no 88-45.213 ; Cass. soc., 24 mars 2004, no 02-41.117).

La limite à ce principe réside dans le temps nécessaire à l'information de l'employeur pour apprécier le degré de gravité de la faute (Cass. soc., 16 janv. 1990, no 87-43.911 ; Cass. soc., 9 nov. 2004, no 02-45.628). Le court délai de réflexion (19 jours) que s'accorde un employeur pour procéder au licenciement d'un salarié n'a pas non plus pour effet de retirer à la faute son caractère de gravité (Cass. soc., 18 déc. 2002, no 00-45.637). De même, il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir patienté (deux mois, en l'espèce), dans un souci d'apaisement, avant de sanctionner des salariés coupables d'indiscipline (Cass. soc., 10 juin 1998, no 96-42.019). La Cour de cassation a également admis que le délai écoulé entre la connaissance des faits pouvant caractériser la faute grave et le licenciement ne pouvait faire obstacle à ce que cette faute grave soit invoquée, dès lors que le délai correspondait à une tentative d'aboutir à un départ négocié (Cass. soc., 27 juin 1991, no 89-44.148).

Le délai nécessaire à la mise en 'uvre de la procédure légale de licenciement, qui s'applique même en cas de faute grave, ne saurait évidemment être invoqué contre l'employeur (Cass. soc., 16 févr. 1987, no 84-44.659, Cah. prud'h. 1988, p. 67).

L'appréciation du délai restreint pour engager la procédure de licenciement pour faute grave relève du pouvoir souverain des juges du fond (Cass. soc., 25 oct. 2005, no 03-47.335, Bull. civ. V, no 302).

En soi, le licenciement pour faute grave n'implique pas nécessairement la mise en 'uvre de la mise à pied conservatoire (Cass. soc., 24 oct. 1991, no 90-41.195). En effet, aucun texte n'oblige l'employeur à prendre une mesure conservatoire avant d'ouvrir une procédure de licenciement motivée par une faute grave (Cass. soc., 9 nov. 2005, no 03-46.797).

Mais il est vrai que les faits invoqués pour caractériser la faute grave impliquent dans la plupart des cas, en raison de leur nature, la mise en 'uvre d'une mesure conservatoire pendant la durée de la procédure.

Aucune sanction disciplinaire ne peut être infligée à titre préventif. Les faits répréhensibles doivent déjà avoir eu lieu à la date à laquelle la rupture du contrat pour faute grave a été prononcée par l'employeur (Cass. soc., 18 févr. 2004, no 02-41.622, Bull. civ. V, no 54).

En effet, c'est au moment où il prononce le licenciement que l'employeur doit invoquer la gravité de la faute pour justifier un licenciement immédiat. La qualification de faute grave ne saurait prendre en compte des faits postérieurs à la notification du licenciement (Cass. soc., 21 févr. 1991, no 89-40.692).

La procédure disciplinaire est enfermée dans des délais très stricts : ' Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement des poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ' (C. trav., art. L. 1332-4).

En d'autres termes, dès que l'employeur a connaissance d'une faute commise par un salarié, il dispose d'un délai de deux mois pour engager les poursuites disciplinaires, c'est-à-dire pour convoquer le salarié à un entretien préalable ou pour lui adresser un avertissement.

Au-delà, la faute est prescrite, ce qui signifie qu'elle ne pourra plus être invoquée à l'appui d'une sanction disciplinaire.

Point de départ du délai pour agissement fautif répréhensible :
C'est le jour où l'employeur, ou le supérieur hiérarchique direct du salarié (Cass. soc., 8 juill. 1998, no 96-41.856 ; Cass. soc., 23 févr. 2005, no 02-47.272) a connaissance du fait fautif qui marque le point de départ du délai de deux mois.

Cordialement

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