SIDA : La personne atteinte du virus a l'obligation d'en informer son partenaire sexuel

Publié par Documentissime le 17/11/2010 | Lu 8862 fois | 1 réaction

« Ça va, on n'est pas obligé de le dire », voilà la réponse provocatrice d'une personne atteinte du sida à sa partenaire à qui il avait transmis le virus, il y a plus de 10 ans. Dans cette affaire, l'homme atteint du virus avait alors été condamné à deux ans de prison ferme pour délit « d'administration de substance nuisible ayant entraîné une infirmité ou une incapacité permanentes ». La jurisprudence reste intransigeante sur la question de la transmission du VIH. Hier, la Cour d'appel de Montpellier a seriné aux malades que si, au contraire, ils ont le devoir d'expliquer leur état aux personnes avec lesquelles ils ont des rapports sexuels. En l'espèce, l'homme ayant tu sa contamination par le VIH, a écopé d'une peine de prison ferme de 18 mois.

La pénalisation de la transmission volontaire du Sida

Comme tout un chacun, une personne atteinte du virus du sida jouit d’une liberté sexuelle.

Cette liberté n’est pas consacrée per se par un texte, mais fait partie intégrante d’autres droits. Ainsi, la liberté sexuelle est une composante du droit de disposer librement de son corps, droit au respect de la vie privée (article 9 du Code civil), et du droit à une vie familiale ou conjugale normale.

Toutefois, en France, le malade affecté du virus HIV voit sa liberté sexuelle amputée par un devoir d’information concernant sa maladie à l’égard de son partenaire sexuel.

En France, est donc pénalisé le fait de transmettre volontairement le sida par voie sexuelle.

En l’espèce, un homme, clairvoyant sur son état, avait transmis le virus du sida à deux de ses maitresses ainsi qu’à l’enfant qui est né d’une de ces unions.

Les victimes ont alors déposé plainte et en novembre 2009, le Tribunal correctionnel de Perpignan a prononcé à l’encontre de cet homme une peine de prison de 5 ans, dont 3 ans et demi avec sursis, assortie d’une mise à l’épreuve de 3 ans avec obligation de soins, pour le délit de « transmission de substance nuisible ayant entraîné une infirmité permanente ».

Le procureur de la république a fait alors appel de la décision, et requis une peine plus lourde à l’encontre du prévenu.

Hier la Cour d’appel de Montpellier n’a pas accédé à la demande du parquet et a condamné le prévenu à 18 mois de prison ferme, en confirmant la décision des juges de première instance.

L’homme dans cette affaire n’a rien d’un dangereux criminel. Il a justifié son silence, concernant sa maladie, à l’égard des ses partenaires, par la crainte de perdre les personnes qu’il a aimées au cours de sa vie. Il a également rappelé vouloir « être comme tout le monde et oublier qu'il était malade ».

Quant aux parties de l’autre côté de la barre, elles ne semblent pas céder à la compassion.

La compagne qui a été contaminée par le virus, tout comme l’enfant qu’elle a portée, souhaiterait se pourvoir en cassation. Elle n’apparait pas satisfaite de la décision rendue par les juges du fond, et souhaiterait que l’homme qui l’a contaminée soit poursuivi pour des faits de nature criminelle.

« Il faut que la place de la victime soit restaurée », a alors indiqué son avocat, Maître Fabien Large.

Ce n’est pas un crime !

Dans cette affaire, l’homme a été condamné pour le délit d’administration de substances nuisibles, sanctionné par l’article 222-15 du Code pénal.

Dans l’état actuel de la jurisprudence, pour sanctionner la transmission volontaire du VIH par l’acte sexuel, les juges ne retiennent pas la qualification criminelle (telle que l’empoisonnement) mais uniquement délictuelle.

L’auteur de la contamination, jugé par le tribunal correctionnel et non par la cour d’assises, est donc poursuivi pour un délit qui débouche sur des peines d’emprisonnement et non sur de la réclusion criminelle.

Dans arrêt du 28 juin 2004, le tribunal correctionnel de Strasbourg avait également condamné l’auteur d’une transmission de contamination du sida pour administration de substance nuisible suivie de mutilation ou infirmité permanente. Les juges avaient alors prononcé à son encontre six ans d’emprisonnement, jugement par la suite confirmé par les juges du fond. (Cour d’appel de Colmar 4 janvier 2005).

C’est pourquoi aujourd’hui, pour caractériser le délit d’administration de substances nuisibles, les juges retiennent que le virus du sida est l’élément matériel nocif incriminé et que le mode d’administration de ce virus est la relation sexuelle.

Pour le Conseil national du sida, ainsi que les associations de séropositifs, la responsabilité d’une transmission du sida par l’acte sexuel doit être partagée par les deux partenaires. L’un devant communiquer sa maladie, l’autre devant prendre toutes les précautions nécessaires.