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Payer une prestation compensatoire en retard peut couter cher...

Publié par Sabine HADDAD le 30/10/2010 | Lu 17156 fois | 5 réactions

Suite au divorce, l'un des conjoints peut être condamné à indemniser par une somme forfaitaire, l'autre pour son préjudice lié à la disparité que la rupture du mariage (divorce) crée dans les conditions de vies respectives des époux. On parle en droit de prestation compensatoire, qui ne peut être demandée que dans le cadre du divorce et sera déterminée soit d'un commun accord entre les parties, soit fixée par un juge aux affaires familiales. Elle pourra prendre diverses modalités : ex un capital par principe, une rente de façon plus exceptionnelle, ou bien les deux, un paiement en nature, usufruit… Je n'aborderai pas dans cet article les thèmes classiques portant sur les critères de fixation de la prestation, ses méthodes de calcul ou ses modes de révision, lesquels ont fait l'objet de mains articles sur ce site plus ou moins complets et de qualité. Je me poserai trois questions, s'agissant du capital à verser : Quand cette prestation est-elle dûe ? Que se passera-t-il lorsque le débiteur versera cette indemnisation au moment de la liquidation du régime matrimonial, en déduisant le montant de la prestation sur la part lui revenant dans la liquidation ? (Prend il des risques ? S'expose t-il au versement d'intérêts ?) L'autre conjoint devra t-il accepter ou refuser ? la première chambre civile de la cour de cassation, dans un arrêt du 8 juillet 2010, N° de pourvoi: 09-14230 s'est repenchée sur cette question.

 

I- La prestation compensatoire : une indemnité destinée à compenser un  préjudice de perte de qualité de vie suite au divorce due lorsque le divorce devient irrévocable.

A)  Une différence de sémantique

Le principe a été posé :

Article 260 du code civil : La décision qui prononce le divorce dissout le mariage à la date à laquelle elle prend force de chose jugée.

1°- La force jugée, en droit ne doit pas se confondre avec l’autorité de la chose jugée ou  une décision irrévocable.

L’autorité de la chose jugée, est attachée au dispositif d’une décision et a pour effet d'empêcher les parties de recommencer un nouveau procès qui porterait sur un différend qui aurait été déjà jugé  entre les mêmes parties, entre les mêmes personnes  sur le même sujet et pour la même cause. On ne rejuge pas une cause déjà jugée !

La force de chose jugée  s’applique à une décision, lorsque celle-ci  n'est pas susceptible de voie de recours à effet suspensif.

Article 500 du NCPC :

« Aforce de chose jugée le jugement qui n'est susceptible d'aucun recours suspensif d'exécution. Le jugement susceptible d'un tel recours acquiert la même force à l'expiration du délai du recours si ce dernier n'a pas été exercé dans le délai ».

La décision est irrévocable, lorsqu’elle n’est susceptible d’aucune voie de recours ordinaire (appel, opposition ) et extraordinaire ( pourvoi en cassation, révision…)

2°- Les rappels de la cour de cassation, en matière de prestation compensatoire

La Cour de cassation, dans un arrêt en date du 8 juillet 2010, au visa  des articles 260 et 1153-1 du code civil, considère que tant la prestation compensatoire que les intérêts qu'elle produit, sont dus à compter de la date à laquelle la décision prononçant le divorce est devenue irrévocable.

Attention, dans cette décision, la cour emploi le terme de décision « irrévocable », légèrement impropre, et un peu regrettable, car c’est bien la force jugée qui est visée ici.

En effet, par force jugée, il  faut comprendre, à compter de la date à laquelle le jugement de divorce n’est plus susceptible de recours(exemple selon les situations de recours envisageables : à l’expiration du délai d’appel, ou bien à la date d’expiration du délai de pourvoi en cassation pour une convention en divorce homologuée par le JAF… ).

En effet, 1ère Civ, 3 novembre 2004, pourvoi  n° 01-16031 avait déjà pu rappeler que :

a)     La prestation compensatoire n’est due qu’à compter de la date à laquelle la décision prononçant le divorce prend force de chose jugée ;

b)    la décision de divorce n’acquiert pas force de chose jugée au moment de son prononcé ni de sa signification.

B)   Comment une décision acquiert-elle force jugée ?

Article 504 du NCPC

La preuve du caractère exécutoire ressort du jugement lorsque celui-ci n'est susceptible d'aucun recours suspensif ou qu'il bénéficie de l'exécution provisoire. Dans les autres cas, cette preuve résulte 

- soit de l'acquiescement de la partie condamnée ;

- soit de la notification de la décision et d'un certificat permettant d'établir, par rapprochement avec cette notification, l'absence, dans le délai, d'une opposition, d'un appel, ou d'un pourvoi en cassation lorsque le pourvoi est suspensif.

1°- l’acquiescement non équivoque des deux ex époux

Cet acte vaut renonciation à l’exercice de toute voie de recours, ordinaire et extraordinaire. Il assortit le jugement de la force de chose jugée.

2°- l’expiration des délais de recours, suspensifs  en cas de signification de la décision.

II-              Le risque découlant d’un paiement tardif rappelé par la cour de cassation : des intérêts légaux, majorés de 5 points après les 2 mois de la signification

La cour considère que la faculté donnée au débiteur de la prestation compensatoire de régler sa dette à l'occasion des opérations de liquidation de la communauté ne retire pas à cette dette son caractère exigible.

Cette conséquence, est essentielle au regard du point de départ des intérêts. L’époux qui  souhaitera attendre la liquidation pour se faire payer la prestation compensatoire, pourra demander des intérêts sur la somme octroyée en capital (A) susceptibles d’être majorés (B)

Il peut user aussi des voies d’exécution pour contraindre son ex conjoint au paiement, sans avoir à attendre la liquidation.

A)  Point de départ classique au jour de la décision irrévocable

Rappel : la Cour de cassation, dans un arrêt en date du 8 juillet 2010, au visa  des articles 260 et 1153-1 du code civil, considère que tant la prestation compensatoire que les intérêts qu'elle produit, sont dus à compter de la date à laquelle la décision prononçant le divorce est devenue irrévocable.

Article 1153-1  du code civil :

En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement.

B)   Le risque de majoration des intérêts

Article L313-3 du Code Monétaire et Financier

En cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fût-ce par provision…Toutefois, le juge de l'exécution peut, à la demande du débiteur ou du créancier, et en considération de la situation du débiteur, exonérer celui-ci de cette majoration ou en réduire le montant.

En cas de confirmation pure et simple par le juge d'appel d'une décision allouant une indemnité en réparation d'un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance.

Dans les autres cas, l'indemnité allouée en appel porte intérêt à compter de la décision d'appel.

Le juge d'appel peut toujours déroger aux dispositions du présent alinéa.

Demeurant à votre disposition

Maître HADDAD Sabine


Les derniers commentaires (5)
Josie a écrit le 20/05/2012 à 17:35:32
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Bonjour Maître, je me permets de vous écrire, effectivement, mon divorce a été prononcé le 4 juin 2009 et en septembre de la même année ma pension compensatoire a été changée de 6000 euros Elle est passée à 8000 euros. Mon ex-mari, enfin, son employeur m'a versé à partir de novembre 2010 par chèques des sommes de 225 euros puis par virement d'un montant de 150 euros. J'avais aussi droit à une pension de secours entre la non conciliation et le jugement de divorce de 150 euros par mois.
Mais là je suis au RSA et le virement du patron ne tombe jamais à date fixe et mon huissier reste muet quant aux démarches pour réagir mon ex-mari de me payer plus rapidement ma pension compensatoire j'en ai au moins pour 4 ans à ce rythme et j'aimerais savoir les intérêts à prétendre. Je suis essoufflée de toujours demandé des réponses. Que me conseillez-vous ? et comment dois-je faire pour récupérez plus vite le restant. Merci de me donner quelque réconfort en m'indiquant la marche à suivre. Tous mes sentiments déférents Maître. Josie
heatheat a écrit le 23/11/2012 à 10:40:52
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Bonjour Maître,
excellent article sur la prestation compensatoire qui pose souvent probléme, les juges ayant tendance à appliquer son réglement lors des opérations de liquidation ce qui leur est pourtant interdit. (Civ 1ére,31 mai 2005, pourvoi n°04-11373 et dans le même sens Civ 2éme, 29 avril 1998, pourvoi n° 96-19890)

De plus, la prestation compensatoire présentant pour partie un caractère alimentaire ne peut faire l'objet de délais de paiement. (Civ 1ére,29 juin 2011, pourvoi n°10-16096)
retraité a écrit le 16/07/2013 à 16:20:00
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bonjour maitre j ai ete condaner a payé 7000euros de pension conpensatoire en un seul versement a ma femme . je suis retraité sans economie et touche une retraite de 1300euros mois . combien de temps j ai pour payé cette pension? sachant que la juge na pas donné de date limite pour payé . bien cordialement
Rackam33 a écrit le 31/07/2013 à 17:59:01
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Bonjour Maître,
Très bon article, deux précisions tout de même.
Lorsqu'une prestation compensatoire définie au tribunal d'instance est confirmée en son entier lors de l'arrêt d'appel, qu'elle est la date de départ des intérêts ? Est-ce la date de décision d'instance ou bien celle de la décision d'arrêt ?
Ai-je bien compris, la majoration de 5 points (art 313-3) s'applique 2 mois après la signification de l'arrêt ?
Bien cordialement.
pat a écrit le 01/03/2016 à 16:41:07
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Bonjour Maître, Mon divorce est prononcé en appel le 12 novembre 2015. Avec les 2 mois de délai pour une éventuelle cassation que je n'ai pas engagé, mon avocate m'a dit que cela serai définitif le 12 janvier 2016. J'ai acquiescé le 13janvier 2016. A ce jour, 1er Mars, mon ex n'a toujours pas versé la prestation compensatoire de 100.000,00€. Que puis-je faire ? Mon avocat me dit d'attendre !! Ai-je droit à des indemnités de retard ? et depuis quelle date, du prononcé au 12 novembre 2015 ou délai pour cassation au 12 janvier 2016. Sachant que mon ex a arrêté la pension alimentaire au 11 janvier 2016. Merci pour votre réponse.

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