Le suicide du salarié du Crédit Agricole serait-il un accident du travail ?

Publié par Documentissime le 12/07/2010 | Lu 9200 fois | 1 réaction

Un salarié du Crédit Agricole s'est suicidé vendredi, en se jetant du troisième étage de l'agence de Cambrai, dans le Nord, sous les yeux de ses collègues. Suite à son décès, la direction du groupe a annoncé que l'homme, âgé d'une trentaine d'années, aurait laissé une lettre expliquant les causes de son geste. Ce suicide volontaire ayant eu lieu sur le lieu de travail du salarié, est-il question d'un accident du travail ? La jurisprudence en la matière est assez récente, et tend à reconnaître, dans certaines circonstances, l'accident du travail.

Vendredi 9 juillet 2010, un employé du Crédit Agricole s’est jeté du troisième étage de l’agence de Cambrai, sous les yeux de deux de ses collègues. Il est décédé sur place des suites de sa chute.

 

S’agit-il d’un accident du travail ?

L’article L. 411-1 du Code de la Sécurité sociale dispose qu’ « est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs personnes ou chefs d’entreprise ».

Une fois la matérialité de l’accident prouvée, ainsi que sa survenance au temps et au lieu de travail, l’accident est présumé imputable au travail. Cependant, il ne s’agit que d’une présomption simple, qui peut être renversée par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie ou par l’employeur, s’ils établissent que le préjudice n’est pas imputable au travail. Pour cela, ils devront démontrer que le travail n’a joué aucun rôle dans la survenance de l’accident.

Un arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 22 mai 1997 a jugé qu’en cas de litige, l’appréciation du caractère étranger au travail relève du pouvoir souverain des juges du fond.

 

La jurisprudence actuelle en matière de suicide

Il faut savoir que, dans un arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 3 avril 2003, il a été jugé que « le fait pour un salarié de mettre fin à ses jours en dehors du temps et du lieu de travail peut quand même être un accident du travail », si un lien direct entre le suicide et le travail est établi.

A l’inverse, selon un arrêt rendu par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation le 18 octobre 2005, « une tentative volontaire de suicide puisant son origine dans des difficultés privées et personnelles ne permet pas de retenir la qualification d’accident du travail ».

En l’espèce, la direction régionale du Crédit Agricole a déclaré que l’homme a laissé une lettre indiquant qu’il s’est suicidé pour des raisons personnelles. A priori, il ne s’agirait donc pas d’un accident du travail. Cependant, la famille de la victime peut, le cas échéant, tenter de prouver, par tous moyens, l’existence d’un lien direct entre son suicide et son travail en faisant appel, notamment, à des témoignages de proches et/ou collègues de travail, et à des certificats médicaux (arrêt de travail pour dépression, par exemple).