La question du mariage homosexuel renvoyée devant le Conseil Constitutionnel

Publié par Sana BENABDESLAM le 17/11/2010 | Lu 7622 fois | 0 réaction

La Cour de cassation a saisi hier le Conseil constitutionnel sur la question du mariage homosexuel. Le 24 août dernier, le tribunal de grande instance de Reims avait transmis à la Cour de cassation une question prioritaire de constitutionnalité concernant les articles 75 et 144 du Code civil, interdisant le mariage entre personnes de même sexe. Cet instrument permet au justiciable français de contester la constitutionnalité d'une disposition législative lors d'une instance en cours, lorsqu'il estime que ce texte porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantis.

Aujourd'hui interdit en France, le mariage homosexuel est autorisé par une bonne partie des autres pays européens.

Le mariage homosexuel fait l’objet de larges débats au sein de notre société. Principale raison, l’évolution des mœurs et de la reconnaissance du mariage entre personnes de même sexe dans les législations de huit payes Européens : Pays-Bas, Belgique, Espagne, Norvège, Suède, Portugal, Islande et Royaume-Uni.

La première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt rendu hier, a jugé la question « nouvelle et sérieuse ».

Limitant « la liberté individuelle d’un citoyen français de contracter mariage avec une personne de même sexe », c’est sur ce fondement que les demandeurs estiment lesdits articles anticonstitutionnels.

C’est la raison pour laquelle, la Cour de cassation n’a pas hésité à saisir le Conseil constitutionnel, comme le permet la Constitution depuis mars 2010.

Vers une égalité des traitements ?

La décision prise par la Cour de cassation marque un véritable tournant.

Cette décision a ainsi réjoui les trois millions d’homosexuels en France qui ne peuvent se marier.

Parfaitement inédite, la démarche entreprise par la Cour de Cassation a été largement saluée par l’ensemble des associations pour le droit au mariage homosexuel.

Nicolas Gougain, porte-parole de l'inter-associative lesbienne-gaie-bi et transsexuels (Inter-LGBT), est tout aussi satisfait de l'arrêt rendu.

« Le vrai progrès sera le vote d’un texte législatif » déclare ce dernier tout en restant réaliste.

Saluant un « pas supplémentaire sur le chemin de l'égalité des droits », le Collectif contre l'homophobie estime aussi que cette décision « témoigne de l'actualité de cette revendication et du retard de la France » par rapport à ses voisins.

Actuellement la France interdit le mariage homosexuel, mais permet à deux personnes, quel que soit leur sexe, de contracter un pacte civil et de solidarité (PACS).

Le porte-parole de l'association des parents et futurs parents gay et lesbiens (APGL), Philippe Rollandin, estime quant à lui que la décision rendue par la Cour de cassation illustre parfaitement « les tiraillements de la société réelle, qui constate l'évolution des mœurs et la société légale ».

« Il y a peu de chances que le Conseil constitutionnel valide le mariage homosexuel, mais cette décision est un nouveau coup de boutoir contre la forteresse législative discriminant l'homosexualité », déclare-t-il.

Il ne faut en effet pas crier victoire trop vite. Le Conseil constitutionnel a toujours le choix de renvoyer à nouveau aux législateurs la responsabilité de définir la notion précise de « mariage ».

En effet, même si cette démarche marque une réelle évolution, il ne faut pas oublier que le Conseil constitutionnel s’était déjà déclaré incompétent à la suite d’une saisine portant sur une question relative à l'homoparentalité. Ce dernier avait ainsi confié aux législateurs le soin de trancher ladite question.

Par ailleurs, je vous invite à lire l’article suivant, s’agissant du juge des affaires familiales (JAF) de Briey qui a accordé à une femme homosexuelle un droit de visite et une pension alimentaire. Ce qui marque bien une évolution plus que certaine au sein de notre société.

Le Conseil constitutionnel se trouve aujourd’hui chargé d’une lourde tâche. Tous les regards sont braqués sur celui à qui il revient de trancher, une fois pour toute, sur un débat des plus médiatisés…