Questionsjuridiques
Questions juridiques

Besoin d'une réponse, ou d’une information juridique ? Le réseau Documentissime est là pour vous aider !

Posez votre question en quelques clics pour obtenir une réponse gratuite de Professionnels du Droit (Avocats, Huissiers, Notaires...)

Posez une question juridique
Notez cet article

La Loi ALUR : nouvelles obligations des locataires et des propriétaires

Publié par Documentissime le 19/03/2014 - Dans le thème :

Immobilier et logement

| Lu 14959 fois |
3 réactions

Votée définitivement après une dernière lecture devant les députés de l'Assemblée nationale le 20 février dernier, la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové est parue au Journal officiel du 26 mars. Portée par la ministre de l'Égalité des territoires et du Logement Cécile Duflot, cette loi de 177 articles a été validée par le Conseil constitutionnel le 20 mars 2014 (décision n° 2014-691 DC). Elle sera complétée par un nombre conséquent de décrets pris en Conseil d'État.

Nous dresserons un récapitulatif des mesures essentielles de cette loi qui va grandement bousculer deux lois existantes : la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, ainsi que la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs. 

Instauration de l'encadrement des loyers dans les "zones tendues" (agglomérations de plus de 50 000 habitants), fixation du plafonnement des indemnités de retard à 5 % du loyer, réduction à un mois du délai de préavis dans les "zones tendues", reconnaissance du contrat de bail d'habitation meublée, encadrement des conditions de vente notamment par le prix, création de la garantie universelle des loyers (GUL), ou encore lutte contre l'habitat insalubre, la loi ALUR peut à juste titre être considérée comme une "loi-fleuve", aux très nombreuses dispositions.

I. Les nouvelles obligations à la charge des propriétaires bailleurs et l'encadrement des loyers :

Si le propriétaire souhaite donner congé à son locataire, la loi insiste sur le fait que toute tentative de congé frauduleux sera sanctionnée par une amende administrative, amende qui peut s'élever à 6 000 pour les personnes physiques, et jusqu'à 30 000 euros pour les personnes morales, sans compter la probable réparation du préjudice subi par le locataire indûment évincé.

De plus, le dépôt de garantie que demandent classiquement les bailleurs sera plafonné, différemment selon que la location porte sur un meublé ou un non meublé. Aussi, le dépôt de garantie ne pourra excéder deux mois pour la première location, et un mois hors charges pour la seconde. Et toujours concernant le dépôt de garantie, celui-ci devra être restitué au locataire, à la fin du bail, dans un délai d'un mois maximum après l'état des lieux de sortie. Tout retard sera sanctionné par une pénalité de 10% du loyer mensuel, cumulable pour chaque période mensuelle commencée en retard. 

Par ailleurs, une innovation concernant la révision annuelle des loyers : jusqu'à maintenant, les loyers pouvaient être révisés en s'appuyant sur l'Indice de Référence des Loyers (IRL). Mais la loi ne pardonne pas au bailleur négligent qui omettrait de réviser le prix du loyer. En effet, si le propriétaire laisse passer plus d'une année entière sans appliquer l'indexation sur le loyer, il lui sera impossible de rattraper plus qu'année. Ainsi, un bailleur qui n'a pas révisé le loyer durant les trois dernières années ne pourra réclamer l'indexation à son locataire que pour la dernière année. Deux années seront donc perdues. 

Enfin, dans les zones dites "tendues", le préfet de chaque département fixera un loyer médian de référence, majoré de 20%, afin de permettre un encadrement des loyers et une accessibilité renforcée au logement, qu'il soit vide ou meublé. La loi prévoyait donc, avant contrôle du Conseil constitutionnel, que tout excès serait impossible, un dérogation pouvant être faite pour certains logements "exceptionnels" disposant d'une situation privilégiée et d'un confort de grande qualité. Cette dérogation a été jugée contraire à la Constitution, aussi cette disposition ne fait pas partie du texte final.

En définitive, deux limites sont donc insérées, à savoir un loyer de référence majoré et un loyer de référence minoré : le loyer de référence majoré ne pourra pas être supérieur à 20 % du loyer de référence fixé par le préfet, et le loyer de référence minoré ne pourra pas être inférieur à 30 % de ce même loyer de référence. Quoi qu'il en soit, la commission départementale de conciliation pourra être saisie par le locataire pour toute contestation relative à un loyer jugé excessif.

II. Une plus grande protection et une plus grande souplesse pour les locataires :

Les dispositions de la loi ALUR sont globalement en faveur des locataires, puisqu'elle insiste sur une protection accrue à leur égard.

Tout d'abord, les honoraires de mise en location du bien seront désormais intégralement à la charge du bailleur (frais d'agence habituellement supportés par le locataire). Le locataire n'aura donc plus à supporter le coût d'un second "mois de loyer" au moment de la signature du bail. Néanmoins, les prestations qui profitent autant au bailleur qu'au locataire seront à la charge de chacun d'entre eux (constitution du dossier, état des lieux, visite...), en respectant, au profit du locataire, un plafond fixé par décret selon le nombre de m² de surface habitable.

De plus, de nombreuses nouvelles mentions vont devoir apparaître sur les contrats de bail, parmi lesquelles : le loyer de référence et le loyer de référence majoré du secteur (voir I), le montant du dépôt de garantie, la nature et le montant des derniers travaux effectués, le montant et la date de versement du dernier loyer par le précédent locataire. La liste exhaustive de ces mentions sera dressée dans un décret pris en Conseil d'État.

Par ailleurs, on observe, pour le locataire, une possibilité plus grande de bénéficier d'un préavis réduit à un mois, au lieu du préavis classique de 3 mois. Outre les raisons déjà prévues par la loi du 6 juillet 1989, comme l'obtention d'un premier emploi, la mutation ou la perte d'un emploi, si le locataire est âgé de plus de 70 ans et dont l'état de santé impose un changement de domicile, ou encore si le locataire est titulaire du RSA, tout locataire pourra bénéficier d'un préavis réduit dans trois autres hypothèses : 1/ en cas de problème de santé constaté par un avis médical, et justifiant un changement de domicile - la limite d'âge de 70 ans est en fait purement et simplement supprimée; 2/ les bénéficiaires de l'allocation adulte handicapé (AAH) pourront également bénéficier de ce préavis réduit; 3/ lorsque le locataire se voit attribuer un logement du parc social public.

III. Les changements à prévoir également du côté de la copropriété et des professionnels de l'immobilier :

La loi prévoit de ce côté deux changements importants : l'ouverture de comptes bancaires séparés, ainsi que l'encadrement de la rémunération du syndic.

D'abord, concernant l'ouverture de comptes bancaires séparés, la loi du 10 juillet 1965 prévoyait que le syndic devait ouvrir un compte bancaire séparé au nom du syndicat. Cependant, l'assemblée générale pouvait en décider autrement à la majorité des voix de l'ensemble des copropriétaires. La loi ALUR rend désormais obligatoire l'ouverture d'un compte bancaire séparé pour chaque copropriété. Une seule exception à cette disposition : l'usage d'un compte bancaire unique pour les copropriété de moins de 15 lots principaux sera toléré. Cependant, le compte unique devra bien comporter un sous-compte clairement identifié relatif au syndic.

Ensuite, concernant la rémunération du syndic, la loi ALUR modifie à nouveau la loi de 1965. Cette dernière prévoyant que certains travaux peuvent être frappés d'honoraires spécifiques au profit du syndic, la loi ALUR précise clairement que la rémunération du syndic sera déterminée de façon forfaitaire, à l'exception de certaines prestations exceptionnelles, définies ultérieurement par décret en Conseil d'État. La loi complète cette disposition en énonçant l'interdiction, à l'encontre du syndic, de mentionner tout barème relatif aux honoraires spécifiques prévus pour certains travaux.

IV. Le cas précis de la location meublée : des changements remarqués et un rapprochement avec la location non meublée :

Les baux d'habitation classiques, à savoir les logements non meublés, sont régis par la loi du 6 juillet 1989. Cette loi énonce expressément qu’elle ne concerne pas les locations meublées. La loi ALUR y remédie, et intègre certaines dispositions des locations non meublées aux locations meublées. Dès lors, un alignement de la législation sera à prévoir sur les points suivants : la liste des clauses dites abusives, les modalités de décompte du délai de préavis, ou encore la liste des documents qu’il est impossible de demander au locataire ou au garant. 

De plus, un décret pris en Conseil d'État va fixer certains minima touchant aux meublés. On notera que le décret imposera une surface minimum d'une pièce principale de 9m² ou 20 m3. Toute erreur sur la surface ou le volume de l'appartement sera retenu contre le bailleur. Par ailleurs, ce même décret va préciser quels sont les meubles indispensables pour qu'un bail ait la qualité de meublé.

Enfin, la loi va prévoir des modèles types de baux d’habitation, meublés ou non meublés, ainsi que des modèles types d’état des lieux. L’état des lieux, une fois effectué et établi par écrit, pourra être complété sous 10 jours. De même, durant le premier mois de la période de chauffe, ce même état des lieux pourra être complété, concernant les installations de chauffage correspondantes.

V. La création de la garantie universelle des loyers (GUL) et la prévention des expulsions :

C'est l'une des innovations majeures de la loi ALUR : la création de la garantie universelle des loyers (GUL). Dès le 1er janvier 2016, tous les logements pourront être assurés par cette garantie. Gratuite et publique, elle peut être demandée en début de bail, ou même en cas de renouvellement, afin de permettre à un grand nombre d'en profiter rapidement.

Cette garantie n'est pas obligatoire, car les bailleurs pourront toujours demander au locataire une caution classique ou encore une assurance privée. Il est bien précisé que la GUL n'est pas cumulable avec une caution, à la seule exception - encore une - d'un étudiant ou d'un apprenti locataire. Le propriétaire devra choisir, entre la GUL ou la caution, pour tout autre locataire. Mais l'option d'une assurance privée complémentaire restera toujours possible.

Pour le propriétaire optant pour la garantie universelle, le loyer sera couvert à hauteur du loyer médian, défini par le préfet, sans prendre en compte la majoration de 20% (voir I.). Elle permettra de protéger les bailleurs de tout impayé qui n'excèdera pas 18 mois, tout en accompagnant le locataire défaillant. Une franchise, d'une durée d'un mois au minimum, est également prévue. Enfin, le financement de la GUL devrait trouver sa source dans une cotisation assumée équitablement par les bailleurs et les locataires, en fonction du prix du loyer.

Désireux de voir cette loi effective le plus rapidement possible, le Gouvernement a déclaré que les nombreux décrets accompagnant la loi seront rédigés avant la rentrée prochaine. La loi serait alors pleinement applicable dès septembre en Île-de-France, et d'ici la fin de l'année sur l'ensemble du territoire national.

Benoît WECK


Les derniers commentaires (3)
Seb 31 a écrit le 21/03/2014 à 09:24:27
Signaler un abus
Rien d'étonnant à ce que le texte ait été validé par le conseil constitutionnel car, au niveau législatif, tout était en ordre (les réformes les plus importantes comme la GUL ont été modifiées). Cependant, je reste sceptique sur ce que va donner la loi sur le long terme car elle continue de se fairE critiquer, que ce soit par les professionnels ou les locataires : http://www.loi-duflot.fr/lois-en-cours/2014-03/la-csf-conteste-la-loi-alur/
Espérons que les résultats seront là, notamment au niveau des logements sociaux !
manny a écrit le 22/03/2014 à 10:59:22
Signaler un abus
la loi Alur est encore une loi faite par des personnes qui n'ont aucune connaissance des réalités du terrain.Les investisseurs notamment, ne font l'effort d’investir dans l'immobilier que s'ils ont des avantages fiscaux supérieurs aux tracas de la location.. aujourd’hui Mme Duflot a réussi, elle à fait chuter la construction de logements libres et sociaux en France par son incompétence et là, elle va permettre la mise en vente plutôt que la mise en location de centaines de biens... bravo.. continuez comme cela on est presque arrivé au fond du trou !
jorgys a écrit le 11/08/2015 à 22:14:13
Signaler un abus
j'ai 85 ans, je désire congédier le locataire d'une maison meublée, la loi ALUR indique qu'après 60 ans j'ai droit a une dispense de délai pour faire ce congé. Ainsi après la lettre recommandée je pourrai reprendre la maison pour la vendre plus rapidement, ai-je bien compris ?

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies pour vous proposer des contenus et services adaptés. En savoir plus - CGU
OK