La discrimination en France, une affaire d'origine

Publié par Documentissime le 21/04/2010 | Lu 7164 fois | 0 réaction

L'INED et l'INSEE, lors d'une étude sur les discriminations en France, se sont notamment intéressés aux motifs les plus souvent invoqués par les victimes de discriminations. Il ressort de cette enquête que le facteur le plus discriminatoire est l'origine. En effet, 40% des personnes souffrant de discrimination sont des personnes immigrées ou enfants d'immigrés. Ces résultats sont également l'occasion de revenir sur le rapport 2009 de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (la HALDE) et les récentes condamnations, notamment en matière de discrimination à l'embauche.

Les conclusions de l’INED et de l’INSEE

L’Institut national d’études démographiques (INED) et l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) ont réalisé une étude sur le thème de la discrimination pour la période de septembre 2008 à février 2009.

Au total, 22.000 personnes âgées de 18 à 50 ans et vivant dans un « ménage ordinaire en France métropolitaine » ont été interrogées.

Il ressort de cette enquête que 40% des personnes victimes de discrimination sont immigrées ou enfants d’immigrés.

Le principal motif de discrimination cité est en effet l'origine ou la nationalité qui représente 37 % des cas. Suivent ensuite la couleur de peau et le sexe à 17% chacun ainsi que l'âge à 12 %.

De manière plus générale, environ 14% des personnes ont expliqué avoir rencontré des discriminations sur les 5 dernières années, cela quel que soit la cause, le lieu ou les circonstances.

L'expérience est rapportée par 10% des individus composant la population majoritaire (ensemble des Français qui ne sont pas immigrés ni fils ou filles d'immigrés ou de personnes nées dans les DOM), par 24% des fils d'immigrés et  26% par des immigrés, soit une proportion deux fois plus élevée dans les deux derniers groupes.

La HALDE

La HALDE, haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité, est une autorité administrative indépendante (AAI) créée par la loi du 30 décembre 2004.

La haute autorité peut être saisie directement par toute personne s'estimant victime de discrimination. Elle aide toute personne à identifier les pratiques discriminatoires, et à les combattre. Elle conseille pour les démarches juridiques, et contribue à établir la preuve de la discrimination. Elle peut se saisir elle-même de toute pratique discriminatoire dont elle a connaissance.

La HALDE dispose de pouvoirs d'investigation pour instruire les dossiers. Elle peut exiger des documents et des preuves que la victime n'a pas pu obtenir, aller vérifier sur place et entendre des témoins.

La HALDE rend annuellement un rapport sur la discrimination et la question de l’égalité en France. Le rapport pour l’année 2009  fait état de 10.545 délibérations, soit une hausse de 21% par rapport à 2008.

49% des réclamations sont liées à l’emploi et 28,5% des réclamations concernent l’origine. L’origine est donc bien présente également dans le rapport de la HALDE comme facteur récurrent de discrimination.

Plus récemment, le tribunal correctionnel de Versailles a condamné le gérant d’une société de travaux publics à verser 8.000 € d’amende et 3.000 € de dommages-intérêts pour discrimination à l’embauche en raison de l’origine. La HALDE avait été saisi par un conducteur de travaux qui estimait avoir été victime de discrimination en raison de son origine.

Cette décision du 10 mars 2010 constitue la 3ème condamnation pour discrimination raciale sur un dossier suivi par la HALDE, depuis le début de l’année.

Le 8 janvier 2010, la Cour d’appel de Versailles avait accordé 32.000 euros à un homme victime de discrimination raciale et le 22 février, AIRBUS avait été condamné pour discrimination par la Cour d’appel de Toulouse.

Qu’est-ce qu’une discrimination ?

Une discrimination est une inégalité de traitement fondée sur un critère prohibé par la loi, comme l'origine, le sexe, le handicap, les mœurs, l’orientation sexuelle, l’âge, la situation de famille ou la grossesse, les caractéristiques génétiques, l’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, les opinions politiques, les activités syndicales ou mutualistes, les convictions religieuses, l’apparence physique, le nom de famille ou en raison de l’état de santé ou le handicap ; cela dans un domaine visé par la loi, comme l'emploi, le logement ou l'éducation.

La loi du 27 mai 2008 qui transpose la directive du 29 juin 2000 définit la discrimination directe et indirecte.

La discrimination peut, en effet, être directe ou indirecte. Elle est directe si l'inégalité se fonde sur un critère prohibé, ou indirecte, lorsqu'une règle, une pratique ou un critère apparemment neutre a un effet défavorable sur un groupe visé par un critère de discrimination. Elle peut également prendre la forme d'un harcèlement. En droit communautaire, le harcèlement est d’ailleurs considéré comme une forme de discrimination.

Dans le Code du travail, il est notamment prévu à l’article L 1132-1 qu’ aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses mœurs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.