L'acompte sur salaire est un droit pour tous les salariés

Publié par Jean-pierre DA ROS le 10/09/2010 | Lu 8501 fois | 1 réaction

L'acompte consiste en un paiement anticipé, par rapport à la date normale de paie, d'un salaire déjà acquis. Il se distingue de l'avance qui s'analyse en un prêt accordé par l'employeur sur des salaires non encore acquis.

Un acompte correspondant, pour une quinzaine, à la moitié de la rémunération mensuelle, est versé au salarié qui en fait la demande (C. trav., art. L. 3242-1).

Autrement dit, le versement de cet acompte est un droit pour tout salarié.

Même s'il entérine une pratique devenue courante, l'article précité, issu de la recodification, généralise un droit qui, à l'origine, était réservé aux ouvriers. En effet, l'ancien article L. 143-2 du Code du travail était ainsi rédigé « Les conventions ou accords collectifs de mensualisation doivent comporter une clause délimitant les conditions du versement éventuel d'acomptes aux ouvriers ».

Quant à l'accord national interprofessionnel du 10 décembre 1977, légalisé par la loi no 78-49 du 19 janvier 1978, le bénéfice de l'acompte ne visait que les « mensualisés », c'est-à-dire les ouvriers qui, par tradition, n'étaient pas payés au mois et pour lesquels il avait fallu un accord ou cette loi pour aboutir au paiement mensuel.

C'était probablement pour éviter une rupture trop brutale avec une longue habitude de perception du salaire à la quinzaine que les partenaires sociaux avaient réservé aux ouvriers le droit à acomptes. Sur le terrain, les entreprises ne font guère la distinction selon les catégories de salariés.

En cas de salaire variable, l'acompte devra être aussi proche que possible du salaire effectivement gagné au cours de la quinzaine considérée (Circ. min., 27 juin 1978, JO 1er juill. 1978, p. 2556).

Forme du paiement :

Sous réserve de dispositions législatives imposant le paiement des salaires sous une forme déterminée, le salaire doit être payé en espèces ou par chèque barré ou par virement à un compte bancaire ou postal (C. trav., art. L. 3241-1).

Au-delà d'un montant mensuel net de 1 500 euros, le paiement par chèque barré ou virement à un compte bancaire ou postal est obligatoire.

En deçà de ce montant, le salarié peut, sur sa demande, être payé en espèces, l'employeur ne pouvant donc lui imposer le paiement par chèque.

Ces règles résultent d'une législation d'ordre purement fiscale (L. no 85-695, 11 juill. 1985, art. 23 ; D. no 85-1073, 7 oct. 1985), le seuil de 1 500 euros étant l'adaptation de la valeur en euros (D. no 2001-96, 2 févr. 2001) du montant fixé à 10 000 F par le décret précité).

La violation des dispositions de l'article précité tombe sous le coup des sanctions pénales édictées par l'article R. 3246-1 du Code du travail.

En outre, l'infraction à la règle du paiement par chèque est punie d'une amende fiscale d'un montant égal à 5 % des sommes indûment payées en numéraire (CGI, art. 1840).

Le paiement par chèque ou virement doit être organisé de telle manière que les salariés disposent des sommes leur revenant en conformité avec les périodicités prévues par la loi (Rép. min., JOANQ. 23 mars 1963 ; voir  no 1053 ).

C'est la date à laquelle le compte est crédité qui constitue la date du paiement (Rép. min., JO Sénat Q. 28 juin 1967, p. 807). Seul l'encaissement effectif a valeur libératoire ; le bénéficiaire d'un chèque non encaissé peut en réclamer un second au tireur, sauf à supporter les frais éventuels occasionnés par la délivrance d'un nouveau chèque (Cass. soc., 20 févr. 1990, no 87-43.897, Cah. prud'h. 1990, p. 201).

La Cour de cassation considère que l'inscription des rémunérations à un compte courant d'associé, avec le plein accord de l'intéressé, équivaut à leur paiement (Cass. soc., 15 oct. 2002, no 00-41.975, Bull. civ. V, no 309, p. 296).

L'accord exprès du salarié est exigé. Ainsi, lorsque l'employeur a placé les salaires en compte courant en raison de difficultés économiques, sans solliciter l'accord du salarié, la rupture du contrat de travail doit être prononcée aux torts de l'employeur (Cass. soc., 23 févr. 2005, no 03-40.482, Bull. civ. V, no 65).

En revanche, compte tenu du caractère aléatoire de cette modalité de paiement, il a été jugé que la rémunération ne pouvait pas être constituée exclusivement, pour des techniciens et des artistes interprètes, par une simple mise en participation (Cass. soc., 16 sept. 2009, no 08-41.191 F-P+B).

Pour certaines catégories d'employeurs (particuliers, associations à but non lucratif…) et de travailleurs, le législateur a institué d'autres modes de paiement du salaire : chèque emploi associatif , chèque emploi-jeune été,  chèque emploi-service universel – Cesu, titre emploi-service entreprise (Tese).