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Détention provisoire et Garde à vue : le Conseil constitutionnel censure plusieurs dispositions du Code de procédure pénale

Publié par Documentissime le 20/12/2010 | Lu 12501 fois | 0 réaction

Dans le cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a émis des réserves, vendredi dernier, sur trois articles du Code de procédure pénale. Ainsi, deux décisions ont été rendues sur la détention provisoire et une sur les gardes à vue prolongées. Le Conseil constitutionnel français a ainsi élargi les droits de personnes placées en détention provisoire dans l'attente de leur procès, en utilisant une nouvelle procédure lui permettant de modifier des lois déjà en vigueur.

Saisis de trois questions prioritaires de constitutionnalité sur différents points du Code de procédure pénale, les Sages en ont censuré certains et émis des réserves d'interprétation sur d'autres, afin notamment de garantir « le respect des dispositions constitutionnelles relatives à une procédure juste et équitable ».

Déjà fragilisée par la critique récurrente du régime de la garde à vue et par la remise en cause du statut du parquet, la procédure pénale française est donc de nouveau sur la sellette !

La détention provisoire

A propos de la détention provisoire (avant jugement), une réserve a été émise sur l'article 148 du Code de procédure pénale.

Le conseil constitutionnel a, dans un premier temps, stipulé que la personne demandant sa remise en liberté doit avoir un accès plus large au dossier.

Ainsi, lorsque le juge d'instruction rejette une demande de mise en liberté, et que celle-ci est par conséquent transmise au juge des libertés et de la détention, la défense doit pouvoir accéder au dossier à ce stade, ce que ne prévoyait pas la procédure actuelle.

En effet, dans le cadre d’une détention provisoire, les sages ont estimé que « le juge de la liberté et de la détention (JLD) ne peut pas rejeter la demande de mise en liberté sans que le demandeur ait pu avoir communication de l'avis du juge d'instruction (qui s'est prononcé en amont) et des réquisitions du ministère public ».

Toujours sur la détention provisoire, le Conseil a également considéré que la chambre criminelle de l'instruction, lorsqu'elle infirme une décision de remise en liberté du juge d'instruction ou du JLD, ne devra pas conserver la main sur la suite de la procédure, comme c'est le cas jusqu'à présent. Elle ne pourra donc se déclarer seule compétente pour statuer.

Ainsi, le Conseil a ordonné une modification de la procédure pénale afin que toute personne en détention provisoire puisse avoir le droit de voir sa demande de remise en liberté examinée éventuellement par deux instances successives, le juge des libertés puis la chambre de l'instruction.

Dès lors, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la Constitution, avec effet immédiat, les 2e et 3e phrases du premier alinéa de l'article 207 du Code de procédure pénale.

Gardes à vue prolongées

La troisième décision rendue par le Conseil constitutionnel porte sur les gardes à vue prolongées à 24 heures par le parquet. Sur ce point, le Conseil entend encadrer la période suivant la garde à vue de deux jours.

Une comparution immédiate n’étant matériellement pas possible, une personne peut être légalement retenue 20 heures supplémentaires au dépôt d'un tribunal, le temps qu'on le défère à un magistrat.

Le Conseil accepte, une nouvelle fois, cette période de 20 heures très critiquée mais ordonne, sous peine de la nullité de la procédure, que le suspect soit présenté, dans ce délai, à un magistrat indépendant, et non à un procureur.

En effet, les sages ont indiqué que « la personne retenue doit être effectivement présentée à un magistrat du siège avant l'expiration du délai de 20 heures ».

Sur l’article 803-3 du Code de procédure pénale, une réserve porte sur la nécessité d'avertir au plus vite de l'arrivée au TGI du suspect le magistrat amené à le juger.

Le juge doit pouvoir « porter une appréciation immédiate sur l'opportunité de la rétention », a estimé le Conseil.

Souligné à maintes reprises par la Cour européenne des droits de l’homme, cette décision est une manière de reconnaître que la privation de liberté, au-delà d'une certaine durée, doit bien être contrôlée par un magistrat indépendant.

Dernièrement, c’est la Cour de cassation qui a rappelé cette nécessité.

« Ces décisions, sans rapport les unes avec les autres, vont dans le sens d'une prise en compte plus grande des droits de la défense », analyse Me Jean-Yves Liénard, pénaliste.

Les décisions rendues par le Conseil constitutionnel constituent ainsi une avancée significative en droit pénal.

Avancées rendues possibles par la procédure de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC), introduite par la réforme de 2008, entrée en vigueur dernièrement.

Cette procédure a par ailleurs déjà permis au Conseil constitutionnel de libéraliser et de renforcer les droits des personnes dans le domaine de la garde à vue, où une réforme a été imposée pour le 1er juillet 2011, et l'hospitalisation d'office pour motifs psychiatriques.


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