La hausse de la TVA en janvier 2014

Publié par Documentissime le 19/11/2013 - Dans le thème :

Consommation et Concurrence

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Créée par la loi du 10 avril 1954 à l'initiative de Maurice Lauré, la TVA - Taxe sur la Valeur Ajoutée, est un impôt indirect sur la consommation. Elle constitue la principale ressource financière des finances publiques, puisqu'elle représente près de 50% des recettes annuelles de l'État, avec 141,2 milliards d'Euros perçus en 2013.

De nombreuses lois ont modifié les taux de TVA, et en parallèle du taux normal, des taux réduits ont vu le jour. À compter du 1er janvier 2014, un nouveau changement en matière de taux de TVA est prévu. Quelques rappels en matière de TVA (I) permettront de présenter les modifications apportées à partir de 2014 (II).

I. Quelques rappels succincts en matière de TVA 

A - Définitions

La TVA est un impôt général de consommation qui atteint en principe tous les biens et services consommés ou utilisés en France.

Elle frappe deux types d'opérations : les livraisons de biens et les prestations de service,  accomplies à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (article 256-I du Code général des impôts - CGI).

- La livraison de biens est définie par l'article 256-II-1° CGI comme le transfert du pouvoir de disposer d'un bien corporel comme un propriétaire. Il s'agit donc d'un transfert de propriété. L'exemple classique sera une vente ou un échange. L'opération doit être passée entre deux personnes différentes juridiquement - ne sont donc pas concernées les opérations internes à une entreprise, et concerne les biens corporels (par opposition aux biens incorporels, comme la cession d'un fonds de commerce, d'un brevet). Les ventes d'immeubles ne rentrent pas non plus dans cette catégorie.

- La prestation de services est définie par défaut à l'article 256-IV du CGI : toute opération qui n'est pas une livraison de biens est une prestation de services. Pour citer quelques exemples de prestations de services : les transports, les locations, la cession d'un brevet, la prestation fournie par le membre d'une profession libérale...

B - Fait générateur, exigibilité et assiette

Le calcul de la TVA collectée par un assujetti auprès de ses clients suppose que soit déterminé :

1/ le fait générateur de la TVA : c'est l'événement qui donne naissance à la créance fiscale du Trésor ;

2/ la date d'exigibilité : il s'agit de la date à laquelle la TVA est due, date à laquelle sera appliquée le taux de TVA correspondant ;

3/ la base d'imposition : c'est l'assiette de la TVA, la somme à laquelle on applique le taux ;

4/ le taux de TVA, qu'il soit super-réduit, réduit, intermédiaire ou normal.

Concernant les livraisons de biens : Le fait générateur et l'exigibilité interviennent au même moment, lors de la livraison du bien (articles 269-1-a et 269-2-a CGI).

Pour précision, dans la pratique, la date du transfert de propriété correspond très souvent à la date de la délivrance physique du bien, soit la remise matérielle entre les mains de l'acheteur. Aussi, la date de paiement du prix est totalement indifférente à l'exigibilité de la TVA.

Concernant les prestations de services : Le fait générateur et l'exigibilité n'interviennent pas au même moment. Pour le 1er : il intervient au moment de la réalisation de la prestation (article 269-1-a CGI) ; pour la 2nde : elle intervient qu'au moment de l'encaissement du prix (article 269-2-c CGI).

Donc, par principe, la TVA est exigible au moment de l'encaissement du prix. Par option, exception, la TVA est exigible au moment du débit, c'est-à-dire au moment de la facturation - lorsque la prestation vient d'être réalisée. La pratique parle alors d'option pour les débits. Il en découle dans ce cas la même règle qu'en matière de livraison de biens : fait générateur et exigibilité interviennent au même moment.

II. Les modifications apportées à partir du 1er janvier 2014 :

A - Les nouveaux taux

Afin de financer le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), les taux de TVA sont modifiés à compter du 1er janvier 2014 (article 278 et suiv. CGI, article qui modifie la Loi de Finances rectificative du 29 décembre 2012, article 68).

- Le taux super-réduit de 2,1% reste inchangé.

- Le taux réduit de TVA passerait de 5,5% à 5% ;

- Le taux intermédiaire est porté de 7% à 10% ;

- Le taux normal quant à lui passe de 19,6% à 20% ;

Le taux super-réduit de 2,1 % frappe les journaux et écrits périodiques à caractère d'intérêt général, les médicaments remboursés par la sécurité sociale ayant fait l'objet d'une autorisation de mise sur le marché, et encore certaines représentations théâtrales et spectacles. Aucun changement de taux n'est donc prévu.

Concernant le taux réduit de 5,5% qui aurait du être abaissé à 5% (eau, boissons non alcoolisées, confiseries, pain, pâtisserie...) comme prévu dans le projet de Loi de finances pour 2014, ce dernier est actuellement en examen à l'Assemblée nationale et au Sénat. Néanmoins, l'Assemblée nationale a voté le maintien du taux actuel à 5,5% courant octobre. Le Sénat ne s'étant pas encore prononcé sur le sujet, le taux réduit reste donc inchangé jusqu'à plus ample information.

Le taux intermédiaire passe de 7% à 10% : créé en 2012, ce taux intermédiaire touche les biens et services proposés par la restauration, l'hôtellerie, les transports publics, et entre autres les médicaments non-remboursables.

Le taux normal de 19,6% est rehaussé à 20% : c'est le taux de droit commun. Tout bien et prestation de services qui n'est pas soumis à l'un des trois taux réduits est soumis au taux normal.

Certaines exceptions sont à noter cependant. En effet, surtout en matière de logements sociaux ou de travaux de rénovation thermique des logements, le taux actuel de 7% baissera à 5%, au lieu des 10% évoqués ci-dessus.

B - Les effets et les aménagements prévus

Les effets du changement de taux de TVA sont sans grande incidence sur les livraisons de biens. On l'a vu, pour un bien soumis à un taux de TVA normal, livré le 1er décembre 2013, et payé le 1er janvier 2014, le taux applicable sera celui en vigueur au jour de la livraison, donc 19,6%. Et pour le même bien livré et payé le 1er janvier 2014, le taux de 20% s'appliquera.

Pour les prestations de services, l'exigibilité intervenant au moment de l'encaissement du prix, si le paiement est effectué en 2013, le taux de TVA 2013, sauf exceptions, à la date d'exécution du service que le taux de TVA s'applique. Si le service a été effectué en 2013, la TVA encaissée en 2014 sera reversés à l'ancien taux.

Dans le cas devis signé en 2013, dont les prestations s'étendent sur l'année 2014, mais ayant fait l'objet d'un acompte en 2013, il conviendra d'établir une facture d'acompte sur laquelle on inscrira la TVA au taux de 2013. Bien entendu, tout acompte versé à partir du 1er janvier 2014 sera soumis au nouveau taux de TVA. Enfin, la facture finale établie en 2014 verra s'appliquer le même taux de l'année 2014 sur le solde restant.

Pour sa part, et sans originalité, la réduction du taux réduit à 5% s'applique aux opérations pour lesquelles la TVA est exigible à compter du 1er janvier 2014 (au moment de la livraison pour les livraisons de bien ; au moment de l'encaissement du prix pour les prestations de service).

L'actualité récente a pu notamment évoquer le sujet de la hausse de la TVA concernant la filière équestre. Le passage de 7% à 20% de taux de TVA s'inscrit dans la droite ligne d'une demande de la Commission européenne, menaçant la France de sanctions si ce taux réduit était maintenu dans ce domaine, suite à la décision de la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE, 8 mars 2012, Commission européenne c. République française).

En effet,  au niveau communautaire, les États membres peuvent introduire soit un, soit deux taux réduits si ceux-ci ne sont pas inférieurs à 5%. D'après les articles 96 à 99 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, modifiée par la directive TVA 2009/47/CE du 5 mai 2009, un taux réduit ne peut s'appliquer qu'à certaines livraisons de biens et prestations de services spécifiquement visées par l'annexe III de la directive TVA de 2009. Cette directive réserve l'application du taux aux opérations relatives aux animaux, et donc les équidés, destinés à être utilisés dans la préparation des denrées alimentaires ou dans la production agricole. Il était donc impossible pour les centres équestres de voir le taux réduit de 7% maintenu.

Afin d'aider la filière à supporter ce changement d'imposition important, le Ministre de l'Économie et des Finances a déclaré le 12 novembre que des mesures allaient être prises afin d'aider les centres d'équitation. La création d'un fonds spécifique et la proposition que les contrats conclus avant 2014 puissent continuer de bénéficier du taux réduit jusqu'à leur terme, ont ainsi été annoncées.

Benoît Weck.