Colère des Auto-entrepreneurs : la polémique sur la cotisation foncière des entreprises enfle sur internet

Publié par Documentissime le 29/11/2010 | Lu 11243 fois | 10 réactions

Votée par les communes, la cotisation foncière des entreprises doit être acquittée avant le 15 décembre. Et les montants sont souvent élevés par rapport au chiffre d'affaires réalisé par les autoentrepreneurs... Une réunion est prévue aujourd'hui à Bercy, qui reconnaît des difficultés. Depuis quelques jours, sur le web, les forums de discussion des auto-entrepreneurs bruissent de mécontentement à ce sujet…

Successeur de la taxe professionnelle, la cotisation foncière des entreprises (CFE) doit être acquittée au plus tard le 15 décembre. La plupart des entreprises y sont soumises.

Depuis quelques jours, les entrepreneurs et auto-entrepreneurs reçoivent un avis d'imposition pour l’année 2010. Et au vu des forums de discussion sur Internet, cet avis les laisse, au mieux, décontenancés et, plus souvent, exaspérés !

Tout le monde est logé à la même enseigne…

« Cette taxe est aujourd'hui réclamée à tous les autoentrepreneurs, non pas en fonction de leur chiffre d'affaires déclaré, mais en fonction de leur commune d'habitation ».

C’est par ces quelques mots que la Fédération des autoentrepreneurs (Fedae) résume les principales raisons du mécontentement.

Il convient de rappeler que la CFE est un impôt planché, fixé par chaque municipalité en fonction d'une base minimale (de 200 à 2 000 euros) et d'un taux (souvent autour de 15 %).

De plus, et même si un autoentrepreneur n’exerce pas d’activité artisanale, à la CFE s'ajoute, dans certains avis d'imposition reçus, une « taxe pour les frais de chambres de métiers et de l'artisanat ».

Force est de constater que le chiffre d'affaires moyen des autoentrepreneurs reste relativement faible. Il était, par exemple, de 6 300 euros annuels en 2009.

Et dans un cas sur deux, il est même inexistant !

Les montants réclamés, au 15 décembre, apparaissent donc parfois très élevés par rapport au revenu généré par l’entreprise. A titre d’exemple, ce sont près de 700 euros réclamés pour 3 000 euros de chiffre d'affaires, 350 euros pour 2 000 euros, ou 550 euros pour un chiffre d'affaires nul...

Pour l'heure, la CFE ne concerne en théorie que les autoentrepreneurs inscrits au 1er janvier 2010, non exonérés de par leur activité et n'ayant pas opté pour le prélèvement forfaitaire libératoire, ceux-là bénéficiant d'une exonération de trois ans. Mais cela représenterait tout de même plusieurs dizaines de milliers de personnes.

Philippe Laurent, président de la commission des finances à l'Association des maires de France (AMF) déclare que la CFE est une « scorie de la loi sur la taxe professionnelle, avec probablement un oubli sur ce cas particulier des entreprises ne réalisant pas ou peu de chiffre d'affaires ».

Pour le gouvernement, le sujet est sensible. Il contredit tout simplement l'affichage sur la simplicité de la création d'entreprise et l'idée, surtout, que l'entrepreneur n'a rien à acquitter s'il ne dégage pas de revenus.

C’est pourquoi une réunion est prévue aujourd'hui à Bercy pour tenter de trouver une solution.

«  Si l'autoentrepreneur n'a pas réalisé de chiffre d'affaires, la doctrine est de considérer qu'il n'y a pas lieu de prélever de CFE. Le principe du zéro chiffre d'affaires-zéro charge est toujours vrai », tente-t-on de rassurer dans l'entourage de Frédéric Lefebvre.

Il reste toutefois à s'en assurer !

Compensation financière éventuelle

Si le gouvernement décide d'exonérer les autoentrepreneurs en deçà d'un certain seuil de chiffre d'affaires, « ce sera à la loi de le préciser. Et nous demanderons une compensation financière », prévient Philippe Laurent.

Le président de la commission des Finances du Sénat, Jean Arthuis, critique le système en déclarant que « cela montre que l'autoentrepreneur est un sujet qu'il faudra reprendre. En créant un statut super-simplifié, on a créé de nouveaux effets de seuil ».

Par ailleurs, à l’occasion de la loi sur le budget de la Sécurité sociale, les parlementaires viennent de réaliser quelques aménagements.

Ainsi, ils ont décidé qu’à partir du 1er janvier, « les auto-entrepreneurs sans activité pendant deux ans perdront le bénéfice du régime ».

De nombreux auto-entrepreneurs déchantent…et se défoulent sur Internet !

Pour ces auto-entrepreneurs, qui pensaient pouvoir bénéficier d'une fiscalité avantageuse pendant les trois premières années de leur activité, c'est la douche froide !

« Le statut d'auto-entrepreneur est mort : payer 50% de son Chiffre d’affaires de taxe, ça calme », déclare Niwam sur le forum auto-entrepreneurs.fr.

« Un choc. A cause de cette nouvelle taxe, j'ai travaillé pour rien en 2009 », témoigne Vava, autre membre du forum qui fait partie de ces nombreux auto-entrepreneurs écœurés et déçus par leur nouveau statut.

Lorsqu'on sait que 40% seulement des auto-entrepreneurs ont réalisé un chiffre d'affaires en 2009, d'une moyenne de 6 300 euros, la nouvelle a de quoi susciter quelques mécontentements…

« Il n'y a pas de quoi être surpris. La transformation de la TP(taxe professionnelle) en CET n'a rien changé », plaide pourtant François Hurel, l'homme qui a porté le projet en 2008 avec Hervé Novelli, alors secrétaire d'Etat aux PME.

En fait, Vava et Niwan, comme beaucoup d'autres, n'ont pas pensé à s'inscrire au régime des prélèvements libératoires. Ce dernier, qui est ouvert aux personnes gagnant moins de 25 000 euros par an, permettait dès 2008 de ne pas payer la taxe professionnelle pendant deux ans.

« Avec la CET c'est exactement le même système. Les personnes inscrites au régime des versements libératoires ne payent pas de taxe pendant les trois premières années de leur activité », ajoute François Hurel.

Depuis la mise en place du régime de l'auto-entrepreneur, le 1er janvier 2009, le gouvernement, pour montrer l'efficacité du dispositif, a régulièrement mis en avant des chiffres record de créations d'entreprise. Mais en se gardant bien d'indiquer que parmi tous ces nouveaux entrepreneurs, certains n'avaient tout simplement aucune activité réelle.

Reste donc à voir comment le sujet va se régler…