L'information annuelle des cautions : les textes

Publié par Michaël NEUMAN le 22/06/2012 - Dans le thème :

Banque et crédits

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Cautionner, c'est un acte que tout un chacun peut être amené à faire au cours de son existence.

Cautionner, c'est avant tout faire confiance à quelqu'un, à son projet, à son entreprise et montrer cette confiance à l'égard d'un tiers qui est sur le point d'apporter également son soutien, mais qui souhaite, quant à lui, être garanti.

Dans le domaine de l'immobilier locatif, notamment d'habitation, il est courant aujourd'hui de recourir à un cautionnement pour garantir le paiement des loyers, la condition de solvabilité ne se portant plus uniquement sur la personne du débiteur même de l'obligation principale, mais également sur le co-débiteur éventuel, duquel on exige parfois une aisance financière encore plus importante.

Cautionner, à ce moment-là, c'est signer un engagement que, paradoxalement, on espère ne jamais avoir à respecter et dont on souhaite avant tout ne plus jamais entendre parler...

Et pourtant, la loi exige que la mémoire de la caution soit rafraîchie régulièrement (annuellement) afin de lui permettre de se préparer au pire (ou de célébrer le mieux), en maîtrisant l'évolution de la dette principale qu'elle pourrait être amenée à devoir régler.

Sur le sujet de l'information annuelle des cautions, les textes se multiplient et le présent article a vocation à les rappeler de manière synthétique.


L'information annuelle hors cadre professionnel

Si la plupart des textes traitant d'une information annuelle des cautions vise le cas où la dette garantie naît de l'activité professionnelle du débiteur principal, il existe néanmoins un type d'information qui a vocation à éclairer certaines cautions qui, dans leur grande bonté, s'engagent à couvrir les errances financières de toute nature du solvens .

Ladite information, visée à l'article 2293 du Code Civil, ne concerne toutefois que les cautionnements dits « indéfinis », contractés par une personne physique.

Celle-ci est donc débitrice d'une « obligation principale » (comprendre : « principale » en référence au caractère « accessoire » de la garantie), cautionnée de manière « indéfinie », c'est-à-dire globale, sans limitation de montant.

Le créancier doit alors informer annuellement la caution, soit à la date convenue contractuellement, soit, à défaut, à la date anniversaire du « contrat » (le texte ne précise pas si l'on parle du contrat entre le créancier et le débiteur ou du contrat de cautionnement), de l' « évolution du montant de la créance garantie et de (s)es accessoires ».

Nul doute que de nombreux créanciers privés n'ont pas connaissance de cette mesure, néanmoins sanctionnée par la déchéance de « tous les accessoires, (...), frais et pénalités ».


L'information annuelle due par le créancier professionnel

Deux textes, dont l'un paraît nécessairement absorbé par l'autre, régissent le cas de la caution personne physique (dont la mémoire et la fiabilité semblent jugées plus fragiles par le législateur) qui vient garantir l'engagement d'un créancier professionnel, quel qu'il soit (bailleur, fournisseur, banquier... et, pourquoi pas, associé, créancier d'un compte courant !).

L'article 47-II de la loi n°94-126 du 11 février 1994, qui renvoie à l'article L.313-22 du Code Monétaire et Financier (CMF), a vocation à s'appliquer pour tout cautionnement à durée indéterminée consenti par une personne physique pour garantir une dette professionnelle d'un entrepreneur individuel.

Plus restrictif que l'article L.341-6 du code de la Consommation (cautionnement à durée indéterminée, garantie de la dette d'un entrepreneur individuel), cette obligation semble nécessairement recouverte par celle mentionnée audit article, qui vise tout engagement de caution, donné par une personne physique, au profit d'un créancier professionnel, quel qu'il soit.

Or, il existe une différence de poids entre ces deux obligations, concernant leur sanction : en effet, l'imputation des paiements effectués par le débiteur sur le principal de la dette, au titre de l'article L.313-22 du CMF, n'est pas visée à l'article L.341-6 du code de la Consommation.

Néanmoins, dans les deux cas, l'information doit avoir lieu au plus tard le 31 mars de chaque année et rappeler non seulement le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires garantis au 31 décembre précédent, mais également le terme de l'engagement.

En cas de caution à durée indéterminée, la faculté de révocation et ses conditions doivent être rappelées dans le courrier concerné.


L'information annuelle due par les établissements de crédit

Première à faire l'objet d'un texte légal, historiquement parlant (l'article L.313-22 du CMF est issu de la loi du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement des difficultés des entreprises), l'obligation d'information qui pèse sur les établissements de crédit est également celle qui a mis le plus de temps à être systématisée et dont le non-respect a été régulièrement argué par les cautions mises dos au mur par une demande de règlement.

La jurisprudence qui applique ce texte abonde et, dans nos prochaines études, nous reviendrons sur sa spécificité et ses modalités de mise en oeuvre.

Retenons simplement à ce stade que l'information annuelle, adressée par l'établissement de crédit à la caution au 31 mars au plus tard, doit être dispensée aux cautions personnes physiques et morales et que la sanction du défaut d'information peut permettre à la caution de s'exonérer largement de son engagement.

En effet, dans une telle situation, les paiements effectués par le débiteur, alors que l'information n'était pas dispensée dans les règles, sont réputés s'imputer, dans les rapports entre la caution et l'établissement de crédit, en priorité sur le principal de la dette cautionnée : en matière de prêts bancaires, les premières échéances étant constituées principalement d'intérêts, l'on voit tout de suite l'intérêt pour la caution de voir le coeur de son engagement diminuer comme une peau de chagrin...


Conclusion

La caution a le mérite de s'engager, en un instant, aux côtés d'un entrepreneur (au sens le plus large que puisse avoir ce terme)... La loi est là pour lui rappeler ce moment de bravoure, tout en mettant à la charge de celui qui a recueilli cette garantie, parfois accordée de manière téméraire, le devoir de mémoire qui s'impose.

La multiplicité des textes relatifs à l'information souligne l'importance du facteur Temps, dans les engagements de caution, rapidement donnés et parfois aussi rapidement oubliés, alors que les conséquences financières potentielle qui les accompagnent devraient toujours être gardées à l'esprit.

La caution, cette garantie que l'on classe ironiquement dans le « hors bilan » des sociétés commerciales, peut en effet grever subitement et lourdement un budget.

NB : une attention particulière sera portée à la date d'entrée en vigueur de chacun de ces textes, afin de savoir s'ils s'appliquent ou non aux cautionnements concernés.