Anniversaire : un an de grève pour les travailleurs sans papiers

Publié par Documentissime le 08/10/2010 | Lu 7047 fois | 1 réaction

Les travailleurs sans papiers occupent depuis ce matin la cité nationale de l'histoire de l'immigration à Paris pour obtenir l'application d'un accord fixant les critères de leur régularisation. Cet accord avait été signé le 18 juin dernier entre le gouvernement et la GCT. Il prévoyait la régularisation des travailleurs sans papiers remplissant certaines conditions. Presque quatre mois plus tard, le bilan est plus que décevant, et sur plus de 1800 demandes déposées, moins de 60 ont obtenu une régularisation. Retour sur le combat de ces salariés pas comme les autres.

La grève

Les travailleurs sans papiers occupent depuis ce matin la cité nationale de l'histoire de l'immigration à Paris pour obtenir l'application d'un accord fixant les critères de leur régularisation. Cet accord avait été signé en juin dernier.

Ils sont 500 travailleurs sans papiers, en grève depuis un an. Depuis qu’ils ont abandonné leur travail pour obtenir leur régularisation, sur les conseils de la CGT.

Ils étaient employés dans l'intérim, le nettoyage, le BTP, l'aide à domicile mais aussi dans les cuisines de grands restaurants, des fournisseurs de grands commanditaires publics, comme de « vrais » salariés, mais sous un nom d’emprunt. Une situation précaire qui durait depuis des mois, des années, voire des dizaines d’années pour certains.

Moussa, gréviste explique : « on est arrivé vers les 10 heures ce matin. Une délégation est reçue par le ministère en ce moment, espérons que ça se débloque. Cela prend beaucoup trop de temps. 12 mois de grève, sans travail, sans rien. J'ai du quitter mon logement faute d'argent. Alors cette fois, je ne partirai pas sans avoir mon récépissé. Que je sois là ou ailleurs, de toute manière, c'est pareil. »

Dekité, un gréviste s’insurge contre la CGT, reprochant au syndicat de ne pas être assez efficace. « Il n'y a que les responsables de la CGT qui peuvent aller déposer les dossiers à la préfecture. Si tu y vas sans tes papiers, tu risques de te faire arrêter et expulser... C'est pour ça qu'on est là. Ils nous tiennent ».

Frise chronologique

2008 : premier mouvement de grèves et occupations de sites.

Octobre 2009 : reprise du mouvement, les travailleurs sans papiers se mettent en grève.

Mai-juin 2010 : les travailleurs sans-papiers ont campé trois semaines devant l'Opéra Bastille à Paris jusqu’à la signature d’un accord intervenu entre la CGT et le gouvernement le vendredi 18 juin.

Accord du 18 juin 2010 : le texte signé avec la CGT, prévoit la régularisation des sans papiers disposant d'une promesse d'embauche et pouvant justifier de 12 mois d'activité, chez un ou plusieurs employeurs, durant les dix-huit derniers mois, voire durant les vingt-quatre derniers mois pour les intérimaires.

Les 6 804 travailleurs sans-papiers grévistes étaient également autorisés à rester en France jusqu'au 30 septembre 2010.

Sur 1800 dossiers déposés début août, moins de 60 auraient été étudiés et auraient débouché sur une autorisation de travail précise Ibrahima Diallo, délégué du mouvement des travailleurs sans-papiers.

Le ministère fait lui état d'un « grand nombre de dossiers incomplets ou auxquels il n'est pas possible de faire suite ».

Des sans-pap qui pourraient rapporter gros selon la CGT

Combien sont-ils en France ?

Difficile à dire, leur situation étant par définition irrégulière… mais selon les associations, 300 000 à 400 000 sans papiers travailleraient en France. Même chiffre pour le Bureau international du travail (BIT). En revanche, la Direction centrale du contrôle de l'immigration et de la lutte contre l'emploi clandestin (Diccilec) avancerait le chiffre de 200 000 (2004).

Pour la CGT, la régularisation des travailleurs sans papiers pourrait rapporter un milliard d'euros aux caisses de retraite :

« Le travail illégal correspond à 4% du PIB. En prenant les chiffres de l'Organisation internationale du travail qui donne à peu près 300 à 400 000 travailleurs sans papiers en France, la moitié qui sont mal déclarés ou non déclarés, la régularisation pourrait rapporter un milliard d'euros notamment aux caisses de retraite » a précisé Francine Blanche.

Les « papiers » c’est quoi exactement ?

En France, on ne peut pas travailler si l’on est étranger en « situation irrégulière », c'est-à-dire sans aucun document, titre ou carte octroyant un droit de résidence sur le sol français.

Le fait de séjourner de manière irrégulière sur le territoire constitue un délit passible d'un an de prison, de 3 750 € d'amende et de 3 ans d'interdiction du territoire.

La plupart des étrangers aujourd’hui en situation irrégulière sont entrés sur le territoire français de façon légale, l'illégalité de leur situation n'étant intervenue qu'après l'expiration de leur titre de séjour, souvent après un refus de la préfecture de leur renouveler ce titre.

Les « papiers » demandés par les travailleurs sans-papiers sont en réalité trois types de cartes :

- la Carte de séjour temporaire : elle peut être accordée aux étrangers qui justifient d'attaches personnelles et familiales en France et remplissent un certain nombre de conditions. Cette carte donne droit à l'exercice d'une activité professionnelle sur l'ensemble du territoire métropolitain.

- la Carte de résident : cette carte « résident longue durée – CE » s’adresse aux étrangers qui sont, au moment de la demande, en séjour régulier : munis soit d'un visa ou d'un titre de séjour.

- l’autorisation provisoire de travail : elle s’adresse aux étrangers qui désirent travailler en France, en qualité d'artiste salarié, de salarié, de travailleur temporaire, de travailleur saisonnier, de salarié détaché, ou, qui souhaitent exercer une activité temporaire (chez un employeur déterminé). Ces personnes doivent rechercher un employeur susceptible de les embaucher. C’est seulement quand ils ont trouvé cet employeur qu’ils peuvent déposer un dossier pour obtenir une autorisation de travail.